jeudi 30 novembre 2017

Bordeaux - ASSE, 3-0

Une expérience ratée


Le staff des Verts a essayé de se rassurer défensivement à Bordeaux à travers une nouvelle approche tactique - malheureusement cette expérience a échoué.


Pour essayer de comprendre quel était le plan de jeu initial des Stéphanois, les conférences de presse de l'entraîneur principal de l'ASSE avant et après le match nous donnent quelques indices : "On est conscient qu’il faut arrêter de prendre des buts, c’est l’affaire de tous. On doit revenir aux bases : être dur à manœuvrer". "Il faut refuser de prendre des buts, ne pas l'accepter, se révolter. Il faut se serrer les coudes, rester unis et refaire les efforts ensemble pour retrouver notre solidité". "Au bout de 4 minutes, le plan de jeu que l'on avait mis en place a volé en éclat.". En effet, on a encaissé un but après 5 minutes de jeu...

Pour ne pas encaisser de but - ce qui semble avoir été le plan initial - le staff Stéphanois a pris l'option d'une défense à 5 :


Doba, écarté du groupe lors du précédent match, a ainsi retrouvé une place de titulaire en tant que latéral droit et Janko s'est retrouvé dans le couloir gauche. Vu que Bordeaux jouait en 4-2-3-1 (donc avec deux joueurs dans chaque couloir), les deux latéraux Verts avaient clairement un match difficile devant eux. Par contre, les Stéphanois avaient un large surnombre derrière, histoire de se rassurer défensivement avant tout.

Les failles du plan


Si le plan initial était de bien défendre, alors le but encaissé après seulement quelques minutes de jeu constitue un sacré échec. Il faut par contre souligner que ce n'est pas la faute du système tactique : on peut mettre autant des défenseurs et milieux défensifs qu'on veut, s'ils ne gagnent pas leurs duels, ça ne sert à rien. Cet ouverture du score a donc complètement changé la donne : les Verts ne pouvaient plus se contenter de défendre, il fallait faire le jeu, chercher l'égalisation. Et c'est là où les limites d'un 3-5-2 contre une équipe en 4-2-3-1 sont devenues apparentes - comme on peut le voir sur cet exemple à la 23e :


Une relance Stéphanoise qui part de la défense, avec KTC qui porte un peu le ballon en cherchant une solution. Sur cette image on voit bien le (4-)2-3-1 de Bordeaux, leur triangle pointe haute au milieu étant parfait pour couvrir nos trois milieux axiaux. Dabo et Janko se trouvent dans leur couloirs, mais avec des ailiers adverses pas très loin : KTC passe à Perrin, qui lui rend le ballon.


Pajot décroche, fait un un-deux avec KTC et revient vers la ligne médiane. Ça attire un tout petit peu l'ailier gauche adverse et le milieu offensif, ce qui suffit pour ouvrir à KTC un angle de passe :


Il trouve donc Dabo dans le couloir : l'ailier a été éliminé par la passe, les deux milieux axiaux sont à côté de Pajot et Hernani, Dabo est tout seul. Le temps qu'il contrôle, qu'il se tourne et lève la tête...


... le défenseur latéral est monté le chercher : l'ASSE avait un joueur dans le couloir, Bordeaux en avait deux. Ce latéral peut monter en toute tranquillité, il n'y a aucun autre Stéphanois dans le couloir. Pajot fait un appel, mais il est suivi par son adversaire direct - et le latéral ferme l'angle de passe de toute façon, il intercepte d'ailleurs la tentative de Dabo. Et cette montée du latéral ne crée pas un déséquilibre dans la défense, Diony se trouve toujours tout seul entre deux défenseurs centraux.

Pour faire simple, on a cherché à construire à partir de la défense, on a réussi à trouver un décalage sur un côté, mais ce décalage n'en était pas un, on était en infériorité numérique dans les couloirs. 


Changement a la pause


On ne pouvait pas construire proprement dans ce système, alors il a été changé à la pause. Il est difficile de dire pourquoi il a fallu attendre jusqu'à la mi-temps pour le faire, surtout que le changement intervient sans faire appel à des remplaçants. Le passage en 4-3-3 (avec Bamba qui prend le couloir gauche et Dabo qui monte en ailier droit) a équilibré les duels dans les couloirs - à titre d'exemple, une relance de la défense à la 49e :


On voit toujours le (4-2-)3-1 de Bordeaux, avec le milieux offensif collé à notre sentinelle et les ailiers qui couvrent les couloirs de KTC et Janko. Pogba joue avec Perrin, qui prend le risque de chercher Diousse, qui remet à Pogba : le pressing de l'avant-centre adverse a été déjoué. 


Pogba passe à Janko, qui cherche plus loin Bamba, dans le même couloir. Pas de décalage créé, la défense de Bordeaux est en place (un 4-2-3-1 devient un 4-4-1-1 quand les ailiers reculent). Bamba essaie donc d'éliminer par un dribble son adversaire direct, mais il n'arrive pas et le ballon sort en touche.


C'est Bamba lui-même qui se dépêche de jouer la touche vite, avec Hernani. Le contrôle du dernier est un peu raté, mais il se rattrape. Comme un milieu axial est sorti de sa ligne pour le chercher, Bamba plonge dans cet espace et il est trouvé par son coéquipier.


Le milieu axial restant se trouve entre deux Stéphanois : Bamba passe à Pajot entre les lignes...


... qui lance Janko en profondeur dans le couloir gauche. Comme les milieux axiaux avaient été éliminés par le jeu de passe de Hernani-Bamba-Pajot, c'est un défenseur central qui cherche Pajot. Diony fait un appel dans cet espace, ce qui aspire les autres défenseurs vers le premier poteau et laisse notre ailier droit tout seul au deuxième. Janko lève la tête et lui adresse un très bon centre du gauche (!), mais la frappe de Dabo atterri sur le toit du stade. Une triste conclusion pour un très beau mouvement collectif : deux joueurs dans le couloir, un ailier qui entre dans l'axe et un latéral qui prend la profondeur, du jeu de passe avec les milieux relayeurs, on avait presque oublié que c'est possible...


Les Verts sont clairement mieux dans ce système, même s'ils encaissent un 3e but Bordelais sur une perte de ballon de Bamba dans son propre camp. Si l'entrée de RPG pour Pogba, blessé (!), n'avait pas pour but de changer le système, l'entrée de Söderlund, pur avant-centre, à la place de Dabo, milieu axial placé en latéral et puis ailier (!), aurait pu modifier le jeu Stéphanois. Mais le fantasme des nombreux potonautes de voir Söderlund et Diony associés en pointe n'a pas été réalisé lors de ce match, le dernier prenant une place à l'aile, l'ASSE restant dans ce 4-3-3 / 4-1-4-1 :




Conclusions


Pour ce match, les Verts ont essayé d'innover tactiquement et de se rassurer défensivement - deux échecs. L'innovation tactique n'a rien apporté quand on n'avait pas le ballon - le nombre de défenseurs est moins important que leur envie - et elle a même était contre-productive quand on avait la possession. Le staff Stéphanois a mis beaucoup de temps avant de changer : le jeu proposé après la pause a été d'un niveau clairement supérieur, mais le mal était déjà fait. Pire encore, ce système inédit, le 3e en 3 matchs pour Sablé (!), a enlevé des repères à des joueurs en crise de confiance et avec un moral au plus bas. Une décision encore plus inexplicable parce qu'il ne s'agissait pas d'une question d'effectif disponible - le changement tactique à la pause a été fait avec les mêmes joueurs. 

mardi 28 novembre 2017

Castres - RCT, 20-19 (Ashton, Nonu, Fekitoa)

L'avant-match


Après la défaite de la semaine précédente à domicile, le RCT doit se racheter. Mais la tâche ne s'annonce pas facile : un déplacement à Castres est toujours difficile, surtout avec des nombreux internationaux absents - et aucun pour les adversaires ! Et pour les Toulonnais il commence à être urgent de grappiller quelques points pour rester accroché au bon wagon, sans parler du besoin de se rassurer sur les bases...

Le match...


... commence très mal, avec un essai encaissé dès la 3e sur une défense pas bien alignée sur une mêlée Castraise. Et comme les Toulonnais ratent aussi un lancer un touche 3 minutes plus tard, on peut penser à un non-match... mais un ballon récupéré sur une mêlée adverse permet à Ashton de marquer un essai. Et 3 minutes plus tard Nonu marque un autre, après un long temps de jeu dans les 22m adverses. La réussite fuit le buteur de Castres, elle protège le RCT des erreurs de ses joueurs (le double dégagement contré à la 24e), ça commence à tourner dans le bon sens pour les Toulonnais, qui mènent 12-10 à la pause.

Le retour des vestiaires ne change pas beaucoup la physionomie du match, le RCT défend (et le fait plutôt bien), mais se montre trop imprécis sur la conquête pour vraiment punir Castres : des lancés ratés, des en-avants et surtout des pénalités sur mêlées (ou inventées par l'arbitre, comme à la 49e après un long arbitrage vidéo qui n'a rien trouvé. Et après une autre faute toulonnaise (de main cette fois-ci) inventée et une pénalité contre le RCT sur la mêlée, Setiano prend un jaune. Avec 20 minutes restantes et menant de seulement 6 points, les Toulonnais résistent bien un temps, mais encaissent un essai de pénalité sur un énorme maul de 30m. Et dans les 10 dernières minutes, menés de seulement un points, ils n'ont pas réussi à garder le ballon et jouer dans le camp adverse, ne se créant ainsi aucune occasion de repasser devant au score.

L'action


On joue la 52e et le RCT, mené de 1 point, a une touche à l'entrée des 22m Castrais :


Le lancer d'Etrillard (2) est bien capté par Rebbadj (4), qui dévie pour Mathewson (9), qui donne le ballon dans l'axe, où un groupe de trois-quarts composé de Padovani (10), Nonu (12) et Pietersen (14) prépare une attaque. C'est Nonu qui le reçoit, qui avance jusqu'aux 22m où il est plaqué... mais Pietersen le récupère et passe dans l'axe du ruck, jusqu'à la ligne de 5m :


Les trois-quarts ont fait leur boulot, c'est le tour des avants : pendant plus de 30 secondes, les toulonnais pilonnent dans les 5m adverses, du jeu à 0 passes, mais ils n'arrivent pas à trouver la faille... avant qu'Isa arrive à aplatir sur la ligne :


Cependant, l'arbitre considère que c'était un en-avant et donne une mêlée à 5m pour Castres. Elle est bien jouée, le 8 sort le ballon proprement...


... le donne à son demi de mêlée qui dégage au pied et trouve une énorme touche, dans les 22m du RCT ! Une énorme perte de terrain pour les Toulonnais, qui sont donc passés dans un rien de temps du pilonnage dans les 5m adverses à un lancer dans leurs 22.


Le lancer d'Etrillard (2) est capté par Gorgodze (5), qui donne le ballon à Mathewson (9), qui lance Lakafia (8) pour un point de fixation. Et après un autre point de fixation d'Etrillard, on sort au pied :


Sauf que le jeu au pied de Padovani (10) est assez court - si celui du Castrais lui a permis de trouver une touche de 70m, celui-ci a trouvé une touche de 30... et Castres a donc un lancement de jeu dans les 40m du RCT.


La touche est assurée, un maul est formé, qui avance sur un bonne dizaine de mètres avant que le 9 sorte le ballon. Le demi d'ouverture et l'ailier du côté fermé coulissent vers l'axe, c'est le centre qui reçoit le ballon.


Mais la combinaison des trois-quarts castrais a été parfaitement lue par la paire des centres AllBlack des Toulonnais : Nonu (12) sort sur le 10 adverse et Fekitoa (13) sur le 14 - la passe tendue est interceptée et Fekitoa part tout seul de ses 40m pour marquer le 3e essai du RCT. Un essai qui aurait du être marqué sur un lancement propre et du jeu dans les 5m adverses... mais qui a eu le mérite de renverser l'occupation du terrain castraise. Malheureusement, c'étaient les derniers points marqués par les Toulonnais lors de ce match.

La suite


Après 3 défaites consécutives (1 victoire en 5 matchs en Top 14), le RCT va mal. Certes, les matchs internationaux n'ont pas aidé, surtout sur le poste de demi d'ouverture : 2 sélectionnés (Belleau et Trihn-Duc), 1 parti (McAllister), 1 blessé (Wisniewski), les clés du jeu ont été données à un jeune de 18 ans (Carbonel), puis à un arrière italien en manque de repères (Padovani) quand le jeune s'est blessé à son tour. Le retour des internationaux fera du bien aux Toulonnais qui sont maintenant dos au mur et qui doivent absolument gagner en Top 14 et en Coupe d'Europe pour ne pas sombrer dans la crise.

dimanche 26 novembre 2017

ASSE - Strasbourg, 2-2 (Hernani, KMP)

Comment tirer avantage de la largeur du terrain


Même s'ils ont mené deux fois aux score, les Verts n'ont obtenu qu'un match nul contre Strasbourg et ils restent sur 6 matchs consécutifs sans victoire.

Après deux défaites consécutives, prendre un point peut être vu comme rassurant, mais c'est quand-même frustrant de laisser l'adversaire revenir 2 fois au score. Ce qui est encore plus frustrant, c'est de voir que les Verts avaient un avantage tactique lors de ce match, surtout en 1MT, mais qu'ils n'ont pas profité. Cet avantage venait du système utilisé par Strasbourg, un 4-4-2 losange qui est intéressant en possession du ballon, mais qui montre des failles quand on défend. Ces failles apparaissent surtout contre une équipe qui utilise bien la largeur du terrain, comme les Verts l'ont fait, mais en ne profitant que trop rarement jusqu'au bout.

Le 442 losange et les côtés


Le 4-4-2 losange est parfois appelé 4-1-2-1-2 ou 4-3-1-2 - ce n'est pas important, ce qui compte et que l'équipe joue avec 4 défenseurs, 4 milieux et 2 attaquants, mais les 4 milieux sont axiaux, pas excentrés. Autrement dit, il y a une forte densité des joueurs dans l'axe, mais peu sur le côté. Ceci est intéressant en possession du ballon, mais ça peut poser des problèmes quand on défend, surtout si l'adversaire place 2 joueurs dans chaque couloir, des latéraux offensifs en plus des ailiers :


RPG et Pogba, les latéraux stéphanois du jour, n'ont pas d'adversaire direct devant eux, le décalage est créé par le système. A titre d'exemple, cette capture d'écran à la 5e :


On peut bien voir la défense à 4 et le losange au milieu pour Strasbourg, ainsi qu'un de leurs attaquants, le 2e étant hors du cadre avec Perrin et KTC. Les Verts ne sont pas parfaitement alignés (normal en phase d'attaque), mais on peut deviner un 2-4-3-1, avec Pogba et RPG qui montent, le premier avec le ballon, sans personne devant lui.

Le 442 losange et l'axe du terrain


Pour bloquer les couloirs et les latéraux qui montent, il faut excentrer des joueurs, soit un des attaquants, soit les milieux centraux - dans le dernier cas, ça vide un peu l'axe du terrain. Si en plus le jeu est bien écarté sur toute la largeur du terrain, le bloc n'étant pas disposé sur la largeur, il est facile de profiter des espaces créés :

A la 41e, Ruffier démarre une attaque avec KTC - nos deux centraux se sont écartés, Diousse est descendu pour la relance, on reste dans du classique :


Après avoir avancé un peu avec le ballon, KTC le donne à Diousse, qui trouve ensuite Hernani, dans cette action plus bas que Pajot :


Comme RPG est positionné haut, mais sans adversaire direct, il est pris par un milieu central - les trois autres continuent de rester près, dans leur losange un peu déformé. Ce qui veut dire que sur une moitié de la largeur du terrain il n'y a pas d'autres Alsaciens :


Au fait, l'autre attaquant est descendu pour suivre Pogba, mais il y a un espace énorme dans l'axe, le seul milieu qui pouvait le combler étant monté sur Hernani. Les Verts doivent s'y engouffrer, ce que Hernani fait via un un-deux avec KMP :


Il n'y a personne pour combler ce trou, Hernani avance sans problème, bien aidé par l'appel de Söderlund qui fixe les deux défenseurs centraux et lui ouvre l'angle pour une frappe bien placée et l'ouverture du score.

Après la pause


De retour des vestiaires, un changements tactique dans le 11 de Strasbourg a été évident : un des deux attaquants s'est excentré dans le couloir de Pogba et un milieu central dans celui de RPG - défensivement, leur système ressemblait plus à un 4-1-4-1. Ainsi, nos deux latéraux ont touché deux tiers de leurs ballons en 1MT et seulement un tiers en 2MT. Et ceci, malgré une très forte possession après la pause : de la 46e jusqu'au 2e but, à la 56e, l'ASSE a eu 78% de possession - mais moins avec les latéraux qu'auparavant.

Si on regarde par exemple l'action qui amène le 2e but, on voit encore le losange de Strasbourg au milieu, mai aussi un attaquant déjà excentré :


KTC - Perrin - Diousse pour la relance, du classique. Et l'image suivante nous permet de mieux voir le système des deux équipes :


Deux joueurs pour chaque équipe dans les couloirs, Pogba et RPG ont un adversaire direct. Dans l'axe, triangle pointe haute pour l'ASSE, pointe basse pour Strasbourg. Mais si les latéraux et les milieux sont pris en un-contre-un, les Verts ont deux autres options. La première est d'utiliser Perrin en meneur de jeu reculé - dans ce cas, sa longue passe pour KMP est interceptée par le défenseur, mais le ballon est de suite récupéré par Hernani...


... et via RPG, Pajot et Diousse, il revient à Perrin. Le capitaine monte avec le ballon...


... et Bamba décroche pour lui proposer une solution - c'est la 2e option des Verts pour faire du jeu si leurs trois milieux et deux latéraux sont pris, utiliser un ailier. Bamba et Perrin combinent...


... et Söderlund décroche pour proposer une solution aussi. Si on regarde attentivement cette image, on se rend compte que côté Strasbourg on ne voit pas un attaquant, un latéral et un milieu (celui qui suit RPG) et côté ASSE on ne voit pas KTC (resté avec l'attaquant), RPG et KMP. Ce qui veut dire qu'à droite on a Hernani, RPG et KMP avec seulement deux adversaire (un milieu et un latéral). Bamba peut essayer une transversale pour amener le jeu de ce côté, mais il préfère porter le ballon, sans être vraiment attaqué, avant d'avoir plusieurs options :


Hernani en retrait, RPG complètement libre à droite et KMP qui fait un appel en profondeur - c'est le dernier qui est choisi et l'ASSE passe de nouveau devant au score.


Conclusions


Pour résumer le match, on peut dire que l'ASSE avait l'avantage tactique en 1MT, du fait du système utilisé par Strasbourg. Ce système pouvait permettre aux Alsaciens d'attaquer en nombre, mais, heureusement pour les Verts, ils l'ont rarement fait et surtout sans réussite. Malheureusement pour les Stéphanois, ils n'ont pas vraiment profité de cet avantage tactique, et quand ils l'ont fait, ils ont concédé l'égalisation tout de suite après. Après la pause, Strasbourg a changé de tactique, ce qui a permis à l'ASSE d'avoir une longue possession et domination, mais stérile. Et quand les Verts ont fini par trouver la faille, ils ont de nouveau concédé l'égalisation tout de suite après. Cette 2e égalisation a fait mal à la tête aux Stéphanois, qui n'ont plus mis autant d'envie dans leur jeu qu'auparavant.

Une équipe en confiance aurait du facilement gagner ce match contre une équipe de Strasbourg prenable... mais il est probable que si les Alsaciens voulaient faire le jeu, ils pourraient l'emporter, tellement le manque de cohésion des Verts était criant parfois. Les matchs suivants s'annoncent plus difficiles pour le duo Sablé-Gasset (ou Gasset-Sablé ?), il faut espérer qu'un apportera tactiquement et l'autre psychologiquement, même si à la fin, c'est plus les résultats qu'autre chose qui ramènent la confiance.

mercredi 22 novembre 2017

RCT - Racing, 29-40 (Fekitoa, Pietersen x2, Ashton)

L'avant-match


Après deux semaines de pause, le Top14 reprend, mais sans les internationaux. Entre les plusieurs sélections et les blessés, les Toulonnais sont assez impactés par les absences, même s'ils peuvent aligner une belle 3e ligne et ses impressionnants trois-quarts. Ces derniers peuvent être la clé du match, à condition qu'ils soient mis dans des bonnes conditions, pas comme lors de la défaite à Agen.


Le match...


... peut être résumé avec seulement les 7 premières minutes. Une longue action toulonnaise dès le coup d'envoi, mais sans avancer, sans rien proposer, finie par un en-avant. Pénalité et touche rapidement jouées par le Racing, énorme action de 3 minutes, une superbe défense du RCT, très bien en place, très active au sol, avec des ballons récupérés dont on s'est débarrassé tout de suite. Et surtout, trop de pénalités contre le RCT, 6 (contre 0) à la 20e, le score de 0-10 étant assez normal. Première incursion toulonnaise dans les 5m adverses, premier essai après un maul écroulé et un exploit de Fekitoa, puis une interception une minute plus tard pour un contre de Pietersen et le RCT tourne en tête à la pause sans avoir produit du jeu.

La 2MT commence pareil, avec une belle défense toulonnaise, puis deux autres essais sur des turnovers. Bonus offensif en poche et aucun jeu proposé à la maison, les Toulonnais sont d'un réalisme impressionnant... avant de sombrer. Ils continuent à faire des fautes et commencent à garder le ballon... pour offrir deux essais autour de la 60e. Et en panne d'idées ils n'arrivent pas à revenir au score, encaissant même un 5e essai sur la sirène, synonyme de 40 points pris à domicile...

L'action


On joue la 49e, le RCT mène de 1 point et le Racing a une touche juste après la ligne médiane. Le lancer est propre et le ballon dévié pour le 9 :


Via un relai avec un pilier, le ballon est donné au demi d'ouverture. Nonu (12) sort de la ligne pour couper une passe vers l'extérieur et le 10 adverse pense profiter du trou créé, mais il se fait plaquer par Lakafia (6). Le ballon est vite sorti par le demi de mêlée du Racing vers l'extérieur, où il y a un surnombre :


3 avants pour le premier groupe, 4 arrières sur la largeur, contre seulement 4 Toulonnais et Ashton (15) en couverture. Mais la précipitation du 9 le fait rater sa passe pour son ailier et le ballon est récupéré par Fekitoa (13). Le turnover arrive donc dans le carré orange...


... et le centre Toulonnais ne peut pas être arrêté ! Il casse un plaquage et navigue avec une facilité impressionante entre 4 défenseurs, attirant même le dernier ailier adverse. 5 joueurs tournent autour de lui et arrivent à l'arrêter sur la ligne des 22m, mais pas avant qu'il passe après contact à Radradra (11) qui avait suivi. Et qui donne plus loin à l'extérieur à Ashton (15), sur ce contre fulgurant, ce sont les Toulonnais qui ont fini en surnombre à l'aile...

La suite


Cette 2e défaite consécutive, la 1e à Mayol, fait du mal au moral. Prendre 40 points à domicile ne passe pas facilement, mais au delà du score, c'est le manque criant d'idées offensives côté Toulonnais. Quand on a une telle ligne de trois-quarts, ne pas les utiliser est vraiment frustrant, surtout quand on voit les exploits qu'ils font avec le peu des ballons à leur disposition. Les supporters espéraient une réaction après la défaite à Agent, ils ont été déçus - à voir si elle aura lieu lors des matchs suivants, à Castres (un autre doublon), qui vient de battre La Rochelle, et contre le leader Lyon (pas un doublon proprement-dit, mais les internationaux seront au repos). Bref, pas des matchs faciles et le RCT a grandement besoin de se rassurer...

dimanche 19 novembre 2017

Lille - ASSE, 3-1 (Bamba)

Une défaite logique


Une petite analyse tactique pour une petit match des Verts à Lille.

Pour son premier match d'entraîneur principal de l'ASSE, Julien Sablé a décidé de jouer la carte de la sécurité, avec une équipe ultra-défensive. Dans la continuité de son prédécesseur, des joueurs ont été placés à des postes inhabituels : Pajot s'est retrouvé milieu excentré droit (une première pour lui à l'ASSE) et Dabo en soutien de l'avant-centre (ou milieu offensif haut). Une première pour lui aussi cette saison, mais Galtier l'avait déjà essayé en janvier en Coupe de France à Auxerre, avec la réussite qu'on connaît.


Ce 4-4-1-1 des Verts a du sens quand on regarde Lille jouer. Même si théoriquement ils jouent en 4-2-3-1, le triangle au milieu est plutôt pointe basse quand ils ont le ballon (ce qui arrive très souvent, Lille ayant la meilleure possession de L1 après le PSG). La sentinelle (le "6") est l'organisateur du jeu et il y a 4 joueurs (les deux ailiers, le "8" et le "10") qui sont prêts à recevoir le ballon. Le choix stéphanois a donc été de faire un marquage individuel sur le 6 - le rôle de Dabo - et de mettre une ligne de 4 milieux, une ligne très serrée, même les deux excentrés Pajot et KMP étant plus dans l'axe que sur le côté.

Ce positionnement axial des excentrés permet de prendre chaque milieu axial adverse à deux (Pajot-Maïga d'un côté, Selnaes-KMP de l'autre) - vu le dézonage permanent des Lillois, ce surnombre est rassurant. Et quand un latéral adverse prend le couloir, l'excentré stéphanois doit sortir le bloquer. Comme par exemple dans cette capture d'écran où on voit bien le bloc Vert et la sortie de KMP pour chercher Malcuit :


Les failles


Le plan de jeu de l'ASSE a été donc assez simple : on laisse la possession à l'adversaire, on l'empêche de construire (marquage individuel sur le 6) et on densifie l'axe. Ça oblige les adversaires de passer par les côtés, avec les latéraux, ce qui malheureusement représente un des leurs points forts, surtout quand la qualité du jeu collectif est au rendez-vous, comme sur l'exemple suivant.

A la 31e, Lille démarre une attaque à partir de sa défense :


Bamba et Dabo coupent les possibilités de passe vers le 6, les 4 milieux sont dans l'axe pour surveiller le 8 et le 10. Le ballon est donné au latéral droit. KMP étant loin de lui, il a le temps de chercher des solutions :


KMP est obligé de le chercher, le 10 fait un appel dans la zone libérée, Maïga le suit, alors le 6 fait un appel dans la zone libérée... pas suivi par Dabo. Pire, RPG se trouve très loin de l'ailier adverse (son adversaire direct, qui est facilement trouvé - KMP partant de loin, ne peut pas fermer l'angle de passe. 


L'ailier adverse trouve le 6 derrière la ligne des milieux, qui a été donc traversée dans 2 passes, et Malcuit fait un appel dans le couloir...


... pas suivi par KMP (remarquez comment ils étaient un à côté de l'autre sur la capture précédente et la distance qui les sépare 3 secondes plus tard). Le latéral Lillois reçoit le ballon, l'ailier lui propose une solution...

... et heureusement pour l'ASSE Perrin intercepte la passe pour l'avant-centre, dans une situation de 4-contre-4 dans la défense. Pour la suite de l'action, le capitaine remonte un peu avec le ballon, avant de chercher KMP dans son couloir (le latéral étant monté, c'est une possibilité de contre), mais sa passe va directement en touche. Comme un symbole.


C'était une merveille de jeu collectif, typique pour les équipes de Bielsa, avec des passes en diagonale, mais toujours vers l'avant, grâce aux appels dans les espaces. Un jeu qui a réduit en miettes le bloc stéphanois sur le côté droit, mais il faut aussi souligner que les Verts l'ont rendu possible avec leur placement loin des adversaires directs ou le manque de conviction quand il faut suivre son adversaire qui fait un appel...


Des conclusions...


... on ne peut pas en tirer, après un seul match, préparé pendant seulement deux jours par le nouveau staff. On a laissé jouer les Lillois sur des points forts (possession du ballon, jeu sur les côtés), sans les défier sur leur point faible (fébrilité défensive), avec des joueurs stéphanois très en manque de confiance. Le match suivant, la réception de Strasbourg, sera plus révélateur : un adversaire théoriquement plus faible, à domicile, avec plus de temps pour le préparer. De plus, c'est un concurrent direct pour ce qui est le nouvel objectif de l'ASSE cette saison et ça sera probablement le dernier match dans un Geoffroy-Guichard avec des kops pleins avant 2018...

mercredi 8 novembre 2017

ASSE - Lyon, 0-5

Ce qui aurait pu être


Est-il possible de s'imaginer le dernier derby avec un déroulement différent, un qui ne nous assomme pas et qui ne nous plonge pas dans un profond désespoir ?


L'ASSE reçoit une équipe qui aime avoir la possession, avec un effectif d'une meilleure qualité et en pleine forme, suite à deux sorties européennes réussies. Le staff stéphanois prévoit jouer avec un faux-neuf, pas d'avant-centre classique, et chercher un jeu vertical après une récupération assez haute, à hauteur de la ligne médiane. Le plan de jeu est simple : une entame parfaite, un but rapide, après quoi les Verts pourront défendre, laissant la possession à leur adversaires et jouer les contres - même si on ne marque pas sur ces contres, un bloc défensif bas et serré rendra cette possession adverse stérile.

Ce passage décrit parfaitement le premier match de la saison, la victoire contre Nice qui a généré tant d'espoir chez les supporters Verts, espoir de résultats, mais aussi de qualité de jeu, basé sur verticalité et mouvement. Ce passage décrit aussi le dernier match joué par l'ASSE, mais malheureusement à un détail près... le but rapide, l'entame parfaite. Au contraire, tout a basculé dans l'autre direction en espace d'une minute et la spirale négative enclenchée a conduit à une des pires soirées dans le passé récent du club.


Le tournant du match


Après une récupération haute et du jeu sur le côté gauche, Pajot obtient une touche, qui est jouée par MBengue pour Bamba :


Sous la pression d'un milieu axial adverse, Bamba revient avec le ballon, avant de pouvoir le donner à Maïga dans l'axe. On peut voir sur cette image que Bamba, Selnaes et Maïga sont surveillés par le trio des milieux adverses, Pajot et KMP par des défenseurs. Dès qu'il reçoit le ballon de Bamba, Maïga joue en une touche...


... pour KMP, qui remet en une touche aussi à Pajot. La passe de Maïga est parfaite, elle permet de passer la ligne de trois milieux, amenant le jeu dans la défense adverse. Défense qui descend encore plus...


... suite à l'appel de KMP en profondeur, ce qui permet à Pajot de se retourner - les milieux axiaux sont loin, les défenseurs en train de reculer. Bamba lui propose une autre option dans l'espace créé entre les lignes, mais Pajot use d'une autre passe verticale, en profondeur pour l'appel de Hamouma qui arrive en face-à-face avec le vilain gardien adverse.


Malheureusement Romain rate son duel, se claque et rate complètement le corner qui suit, ce qui amène l'ouverture du score adverse. Ce qui aurait pu être une entame parfaite se transforme dans une ratée, non seulement l'ASSE est menée au score, mais Hamouma est sorti et remplacé par Söderlund, un profil complètement différent. 


La suite du match


Et pourtant, les Verts n'ont pas baissé les bras et ils ont continuer à user des passes verticales, à être présents dans les duels et à récupérer le ballon à la hauteur de la ligne médiane dès qu'il était perdu. A titre d'exemple, une longue action à la 20e, qui commence avec une touche adverse :


Le latéral la joue pour son milieu offensif, qui, pris par Selnaes, lui rend le ballon en retrait. Selnaes laisse le milieu pour aller presser haut sur le latéral...


... et finit par l'obliger de faire une passe hasardeuse, interceptée par Bamba. Le pressing stéphanois était bien amené, avec Maïga et Pajot prenant les milieux axiaux, Söderlund le défenseur central et Bamba couvrant Selnaes en retrait. Bamba joue directement pour Söderlund, mais pas assez en profondeur pour le lancer dans un face-à-face. Le Norvégien lui remet donc le ballon dans le couloir, mais son centre est contré. La touche est jouée par Pierre-Gabriel...


... pour une déviation de Söderlund, reprise par la défense. Le ballon dégagé est gagné par Selnaes au duel contre le milieu offensif et il est donné en retrait à KTC...


... qui joue avec MBengue, qui le donne jusqu'à Ruffier, pour étirer le bloc adverse, les faire sortir. Ruffier dégage loin...


... en cherchant Pajot, qui perd son duel de la tête contre un défenseur, mais KMP gagne le sien contre un milieu et le ballon arrive à MBengue, qui le donne tout de suite dans l'axe à Selnaes :


Il essaye une passe verticale qui coupe la ligne des milieux pour KMP, mais il est devancé par le défenseur, qui lance tout de suite son milieu offensif. Sauf que Selnaes le tacle et on récupère la possession au milieu du terrain. Pas pour longtemps, parce que ...


... Maïga rate sa passe pour KMP. Les adversaires essayent de sortir de leur moitié dans le couloir droit, mais l'ailier porte trop le ballon...


... ce qui permet à KMP de revenir, tacler et le récupérer. Selnaes hérite du ballon et monte avec...


... avant de décaler Bamba sur sa droite, qui donne en retrait à Maïga, qui...


... lance RPG monté dans son couloir droit, qui lance Bamba en profondeur sur ce côté. Malheureusement le centre de ce dernier est gagné par la défense, qui dégage en catastrophe...


... jusqu'à Selnaes qui récupère de nouveau. Il essaye une passe pour Pajot, libre au 18m, mais un défenseur surgit pour intercepter et dégager loin...


... jusqu'à Lacroix, qui gagne son duel de la tête. MBengue récupère le ballon et le donne de nouveau à l'organisateur de jeu Norvégien :


Selnaes essaye de lancer KMP en profondeur, le ballon est dégagé de la tête par le latéral... jusqu'au même joueur, omniprésent au milieu. Il monte de nouveau en cherchant une solution de passe...


... qui arrive parce que le milieu axial adverse se retrouve seul entre lui et Pajot. Le Norvégien joue avec son avant-centre, qui remet en une touche pour Pajot, qui avait bien sûr fait l'appel qu'il fallait en profondeur. Malheureusement la possession est perdue...


... mais pas pour longtemps, maintenant c'est Maïga qui intercepte la passe. Il écarte pour RPG, qui cherche Bamba entre les lignes, mais à cause d'un mauvais contrôle, le ballon est perdu de nouveau... jusqu'au dégagement adverse intercepté par KTC. On arrête ici le suivi de cette action, après avoir suivi plus de deux minutes de possession stéphanoise dans la moitié adverse. Un jeu caractérisé par sa verticalité et un grosse présence pour récupérer le ballon dès qu'il est perdu - perte de balle qui arrive souvent quand on essaye ce genre de passes.

Si la verticalité n'a pas parfaitement fonctionné, dans le sens qu'il y a eu peu d'occasions franches créées, la récupération au niveau de la ligne médiane a été bien faite, les adversaires avaient du mal à sortir de leur moitié. Malheureusement, 4 minutes plus tard, une autre passe verticale de Selnaes (hasardeuse cette fois-ci) est interceptée et le ballon lancé dans son dos n'est pas récupéré au milieu du terrain... la punition est immédiate avec le 2e but adverse.


La suite du match (2)


Ce but contre le cours du jeu a coupé l'élan des Verts. Pire, la pause n'a pas permis des réajustements tactiques, avec un autre changement suite à une blessure. Et le rouge deux minutes plus tard a complètement tué le match. Pire encore, les stéphanois se sont jetés en attaque pour réduire le score, laissant des grands espaces derrière, parfaitement exploités en contre. L'addition est ainsi devenue historiquement salée et les événements en fin de match ont conclu une soirée cauchemardesque pour l'ASSE. 

Mais il est difficile de ne pas se demander quel aurait été le cours du match si Hamouma avait marqué à la 10e, sans se blesser, ou si on avait marqué pendant le temps fort avant le 2e but adverse ?



La suite après le match


La gueule de bois a du mal à passer. Pour les supporters, mais au sein du club aussi. Cette défaite historique peut laisser des traces qui seront difficiles à effacer, une cassure entre les supporters et leur équipe, ou entre les joueurs et leurs coach, ou entre le staff et la direction ou entre les dirigeants et les supporters. Toute la saison (et même plus que ça) se jouera dans les jours ou les semaines à venir sur la capacité de tous ces acteurs à relever la tête. Si on y arrive, tout n'est pas perdu (mais tout ne sera pas oublié). Si on n'y arrive pas, ça va aller de mal en pis.