dimanche 29 mars 2020

Le nerf de la guerre (2)

Dans le foot actuel l'argent est un élément incontournable : non seulement combien on en a, mais aussi comment il est utilisé.

En pleine période de confinement, ça discute beaucoup sur la probable crise économique qui suivra celle d'ordre sanitaire. Les enjeux financiers sont importants, le manque des revenus peut être fatal à pas mal d'entreprises, dont les clubs de foot. Surtout ceux qui sont très dépendants des revenus extérieurs comme les droits télé. D'où la pression que les principaux intéressés mettent sur la reprise de la saison, peu importe les contraintes du calendrier.

Voici donc un petit tour d'horizon sur l'envergure financière de l'ASSE et l'utilisation qui est faite de son argent. Cette analyse reprend celle de juin 2019 en rajoutant le bilan comptable de la saison 2018-19, rendu public il y a quelques semaines.



Revenus et coûts


Même si ce sont les montants les plus véhiculés dans la presse et dans les discussions entre les supporters, les chiffres des transferts des joueurs ne sont pas inclus dans la première analyse. Ainsi, on compare les revenus (l'argent qui entre au club) et les coûts (l'argent qui sort du club) pour tout sauf les mutations :


Les revenus du club proviennent surtout des droits télé (57% du total la saison dernière), des sponsors (25,4%), de la billetterie (8,3%) ou de la vente des différents produits (9,3%). Les coûts sont liés au fonctionnement du club, par exemple des loyers, mais surtout des salaires.

Le club a observé une haute de ses revenus lors des saisons européennes 2014-2017 avec les phases de poule de Ligue Europa (primes de l'UEFA, droits télé, billetterie, sponsors). Ces revenus ont logiquement baissé lors de la 1e saison sans Europe (2017-18), mais sont revenus à un niveau haut la saison dernière, même sans la Coupe d'Europe. Ceci provient partiellement des droits télé liés à un meilleur classement (+2M), mais surtout d'une impressionnante hausse de la recette des sponsors : passant de 10 à 19 millions euros d'une saison à l'autre.

Quant aux coûts, à l'exception de la saison 2016-17, le club observe souvent un léger déficit, de quelques millions annuels. Pour un club en auto-financement, sans un propriétaire qui peut rajouter de l'argent quand il y a besoin, ce déficit peut être comblé par des fonds propres (argent mis de côté quand les années ont été positives), par un emprunt (augmentant donc les coûts des années suivantes) ou par les transferts. Ainsi, si on regarde la balance des derniers mercatos...



... on voit que le club a sensiblement plus vendu qu'acheter lors des saisons sans Coupe d'Europe. Ce sont les chiffres réels, les vraies sommes dépensées ou encaissées par l'ASSE sur chaque exercice comptable. La simulation réalisée par les supporters lors de chaque mercato ("je vends lui à 10M et j'achète deux autres à 5M chaque") n'est rien qu'un jeu, qui ne prend pas en compte que le paiement peut se faire sur plusieurs années, qu'il y a plein de clauses et bonus qui modifient les sommes et que quelqu'un doit payer les intermédiaires. Bref, à l'exception de la saison 2016-17 quand le club a eu des entrées plus grandes que ses coûts, les Verts ont toujours généré des revenus grâce aux transferts des joueurs - ceci reste malheureusement une obligation, sauf changement important dans la structure financière du club.


Salaires


Le budget d'un club est souvent utilisé comme référence pour estimer la qualité de l'effectif, mais un indicateur plus précis se trouve dans le volume de salaires payés par le club. L'idéal serait de calculer le salaire moyen du 11 titulaire, ou celui du groupe pro, en excluant donc tous les autres salariés du club et en prenant en compte la taille de l'effectif. Mais comme on n'a pas accès à ces données, on se contente de comparer la masse salariale de l'ASSE sur les dernières saisons :


Comme pour les revenus du club, on observe une différence nette avant et après avoir commencé à jouer régulièrement l'Europe. Sauf que pour les salaires, les Verts ont eu besoin d'une saison européenne pour se rendre compte des besoins quantitatives de l'effectif, c'est ainsi à partir de la saison 2015-16 que la masse salariale a augmenté de manière significative. Quant à la saison 2017-18, sans Coupe d'Europe, elle reste dans les montants des précédentes : beaucoup de joueurs en première partie de saison, dégraissage mais arrivées des gros salaires en deuxième. Et ces gros salaires ont fait passer pour la première fois le cap de 50M de masse salariale la saison dernière, avec une hausse de 15%.

Sur les deux saisons précédentes, les salaires ont augmenté, mais les revenus totaux du club aussi, la proportion restant plus au moins la même : 72-73%, ce qui reste normal pour un club de ce type, comme nous le verrons plus bas. Par contre, il y a bien eu un changement de politique sportive, la hausse des salaire doit être relativisée par le nombre des joueurs utilisés. En 2016-17, 21 joueurs ont joué 97% du temps de jeu total possible, mais en 2017-18, seulement 18 joueurs ont été nécessaires pour 99% du temps de jeu possible. Ces chiffres prennent en compte les mouvements au mercato d'hiver (par exemple Beric qui revient de prêt et Söderlund qui parte sont comptés comme un seul joueur et leur temps de jeu cumulé). Bref, si on doit rapporter la masse salariale aux nombre des joueurs utilisés et à leur temps de jeu, les Verts ont payé 2,9 millions par joueur utilisé la saison dernière, contre seulement 2,1 la saison d'avant : une hausse de 38%. Moins de joueurs, payés plus cher.



Est-ce que ce changement de politique salariale et sportive a été gagnant ? Les Stéphanois ont fait une de leur meilleures saisons, finissant à la 4e place. Et si on regarde la masse salariale des équipes importantes du championnat...


... on voit que les Verts ont réellement surperformé. Quand des clubs comme Lyon et Marseille paient autour de 130 millions de salaires, il est logique de finir derrière eux avec seulement 53 millions de masse salariale. Tout simplement, ce ne sont pas les mêmes joueurs qu'on vise. Même si moins impressionnante, la différence avec Rennes reste quand-même importante : ils ont eu une masse salariale 18% plus grande que les Verts ! Pour compléter, on a rajouté le club français qui paye le plus de salaires (après Paris) sur cette saison, Monaco, et sa piètre 17e place.

Pour continuer la comparaison, on regarde le pourcentage des revenus que chaque club utilise pour payer des salaires :

Tous les clubs ont des coûts supplémentaires, étant obligés de payer d'autres choses que des salaires. Ainsi, quand un club dépasse la barre des 80%, il est fort probable que les revenus ne compensent pas les coûts totaux, donc le club doit faire appel à un autre financement, souvent de l'argent injecté par un riche propriétaire. Lille et Monaco restent des cas particuliers : financement externe pour payer des salaires bien au delà des revenus "normaux", misant tout sur les profits des ventes des joueurs.


L'argent ne fait pas tout, mais dans le sport professionnel, plus on en a, plus grandes sont les chances d'avoir des bons résultats. Tout simplement parce qu'on peut payer des plus gros salaires, qui font venir des meilleurs joueurs. Enfin, si on ne se trompe pas dans le recrutement. Si on compare l'ASSE avec les autres équipes de la saison 2018-19...


... on voit apparaître ce fameux plafond. Les trois "gros" (hors Paris) se permettent de payer deux millions de salaire pour chaque point pris, pendant que les Verts n'ont jamais dépassé la barre d'un million. Et ils restent même assez loin, pendant que Lille s'y approche et Rennes a passé le million par point. En on n'en parle même pas de l'accident sportif monégasque.



Conclusions


Après tous ces chiffres et graphiques, quelques observations ressortent facilement. Après la hausse importante des revenus lors des saisons européennes, le club a vu ses revenus rester au niveau grâce aux contrats publicitaires. Pour un club où les propriétaires ne peuvent pas combler le déficit, une balance positive lors du mercato est presque une obligation et le pourcentage de la masse salariale ne doit pas être trop haut. Sur les deux dernières saisons, la masse salariale de l'ASSE a fait un bond de +15%, mais si on considère le nombre des joueurs utilisés, on arrive même à une hausse de +38% par joueur. Mais même avec cette augmentation, les Stéphanois ne jouent toujours pas dans la cour des grands : il existe un réel plafond en championnat et finir devant un "gros" reste un exploit de ce point de vue.


Pour finir, une petite analyse du fameux prêt contracté par les propriétaires stéphanois à l'été 2018. La dette financière du club a fait un bond de 16 millions (passant de 17,8 à 33,9M). Et les disponibilités sont passées de 11,6 à 28,8M. Il est donc probable que même sans d'autres augmentations de la masse salariale, les coûts du club ne feront qu'augmenter - il faudra rembourser cet emprunt. Il faudra donc augmenter les revenus aussi, soit par une grosse vente (Saliba à l'été 2019), soit par une hausse des droits télé (théoriquement à partir de 2020-21). Et il faudra surtout éviter une réduction importante de ces revenus, d'où la bataille actuelle pour finir la saison coûte que coûte. Comme les droits télé représentent plus de la moitié des revenus, le club peut avoir très mal si les diffuseurs ne payent pas les dernières tranches...

mardi 10 mars 2020

ASSE - Bordeaux, 1-1 (Bouanga)

Avec des milieux relayeurs


Même si la qualification en finale de la Coupe de France quelques jours plus tôt avait redonné aux Verts la confiance qui leur faisait défaut depuis un moment, ça n'a pas suffi pour qu'ils emportent enfin un match de championnat...


Un point de pris ou deux de perdus ? La réponse de Claude Puel lors de son analyse d'après-match est sans équivoque : "sur la physionomie du match, on a perdu deux points. Les belles occasions qu’on a eues malgré la débauche d’énergie consentie deux jours et demi plus tôt en Coupe montrent qu'on y est dans l'état d'esprit. On a réalisé un gros match avec de la qualité et de l’intensité. (...) On méritait beaucoup, beaucoup mieux. Bien sûr, ce nul n’a pas la saveur d’une victoire mais on est dans la continuité de notre match de Coupe".

En effet, ses protégés ont produit une bonne prestation, comme dans la semaine, en demi-finale de Coupe. Et même si l'approche tactique ne fait pas tout, elle a été très similaire lors de ces deux derniers matchs, ce qui ne peut pas être juste une coïncidence...


Système tactique


Contre Rennes en Coupe de France, le système utilisé a été un 4-3-3 / 4-1-4-1 :


Des défenseurs disciplinés tactiquement, surtout sur les côtés (là où Maçon, Palencia ou Trauco ont pêché par le passé). M'Vila en sentinelle, capable à la fois de solidifier le bloc équipe et d'être à la relance. Et deux autres milieux axiaux qui se placent entre les lignes adverses, d'où ils relayent le ballon vers les ailiers.


Et le même système a été reconduit contre Bordeaux, avec la présence de Aholou à la place de Cabaye (blessé) et de Boudebouz (héros en Coupe) à celle de Honorat, à l'aile droite :



Enfin, c'est le système de début de match pour l'ASSE, parce que les changements intervenus en 2MT  ne l'ont pas préservé :


Si l'entrée d'Abi à la place de Diony a été du poste pour poste, Nordin, après des longues semaines de blessure, a remplacé Aholou. Il a pris l'aile droite et les Verts sont passés en 4-2-3-1 / 4-4-2. Malheureusement, pas pour longtemps, parce que l'expulsion de Camara a obligé le staff stéphanois de revoir le bloc équipe :


Dioussé a remplacé Boudebouz et s'est placé à côté de M'Vila dans l'axe, les Verts passant ainsi en 4-4-1. Et ils ont résisté dans cette formule jusqu'à la fin, préservant le point du match nul - ou regrettant les occasions ratées plutôt dans le match, selon.


Relayer le ballon


Le 4-3-3 est un système tactique très classique et une de clés dans son animation est le milieu relayeur. Voici quelques exemples du rôle de ces milieux dans le match des Verts contre Bordeaux.

A la 12e minute, la jeune charnière stéphanoise se passe le ballon avec l'aide de Jessy Moulin :


Le trio du milieu se trouve plus haut sur le terrain, c'est à eux d'amener le ballon vers l'avant. Ils descendent tous d'un cran pour offrir des solutions à Saliba, qui porte le ballon :


Le bloc adverse, en (4)-4-2 se trouve haut, mais Saliba trouve Aholou, qui élimine son adversaire direct...


... et lance en profondeur Bouanga, qui frappe dans un angle fermé. Dans cet exemple, Aholou a servi de rampe de lancement en profondeur pour les attaquants.


Quelques minutes plus tard, la même relance dans la surface stéphanoise :


Même positionnement qu'auparavant pour les milieux, M'Vila qui aide à hauteur de la défense, les deux autres bien plus haut. Mais Camara décroche pour offrir une solution à Fofana...


... et joue à droite avec Debuchy avant de se projeter vite vers l'avant :


Debuchy joue avec Boudebouz, qui essaye de lancer Camara en profondeur à droite. Malheureusement, sa passe est interceptée. Dans cet exemple, Camara a participé à la construction avant de prendre la place d'un ailier.


Même pas une minute après, Debuchy joue une touche avec Boudebouz dans sa propre moitié :


Les deux joueurs s'échangent le ballon et Boudebouz part dans une série de dribbles dans le couloir droit, avant de repiquer vers l'axe...


... et décaler parfaitement Bouanga sur le côté opposé. L'ailier gauche stéphanois entre dans la surface et les solutions lui sont proposées par Diony, naturellement, mais aussi...


... par Aholou et Camara. Dans cet exemple qui correspond à la première grosse occasion des Verts, on voit bien l'apport offensif des deux milieux.


Les exemples précédentes nous montrent les plusieurs aspects du jeu offensif d'un milieu relayeur : aider sa défense à construire, servir de rampe de lancement, se projeter en attaque jusqu'à la surface adverse. Mais leur rôle le plus important en phase de possession du ballon reste... de relayer le ballon de la défense à l'attaque.

Comme par exemple à la 39e, quand le ballon circule entre les défenseurs, de Debuchy jusqu'à Saliba :


M'Vila et Camara se trouvent bas, en dehors du bloc adverse, pendant qu'Aholou se trouve très haut, à la même hauteur que Diony. Mais il n'y reste pas longtemps...


... et offre une solution entre les lignes, où la passe de Saliba le trouve parfaitement. Cette passe verticale casse les deux premières lignes du bloc et Aholou n'a plus qu'à relayer le ballon jusqu'à Bouanga, avec une autre. Avant bien sûr de se projeter dans la surface adverse :


Le centre de Bouanga à destination de Boudebouz est repoussé par la défense, mais c'est toujours Aholou qui est à la lutte pour le récupérer, avec Camara pas loin. Le ballon arrive finalement dans les pieds de Boudebouz à l'entrée de la surface et son centre-tir frôle la lucarne opposée.


Rien n'a changé à la pause, comme on peut le voir dans cet exemple juste après le retour des vestiaires :


M'Vila se trouve toujours bas, à hauteur de la défense, ses deux compères du milieu se trouvent bien plus haut, surtout que Boudebouz avait décroché pour aider à la construction. D'ailleurs, il est intéressant d'observer le positionnement de Bouanga et Diony, très excentrés - les deux défenseurs centraux bordelais n'ont aucun adversaire à suivre. Le ballon arrive donc à Saliba, qui joue avec Kolo...


... et Aholou se détache du marquage pour offrir une solution entre les lignes, où il est trouvé et d'où il relaye le ballon pour Bouanga. Du jeu à trois à gauche (latéral-relayeur-ailier), rien de plus classique, mais beau à voir pour les spectateurs stéphanois, pas trop habitués à ce genre de mouvement le dernier temps.


A la 56e, même construction avec la défense centrale aidée par M'Vila, descendu à gauche, comme il avait l'habitude pendant la période Gasset :


Aholou plus haut, Camara se place entre les deux lignes de 4 et 2 pour offrir une solution. Il est trouvé, mais joue en arrière avec Saliba. Le ballon est passé de nouveau horizontalement et arrive à M'Vila...


... qui trouve Aholou avec une passe verticale. Diony et Bouanga sont de nouveaux excentrés, la défense centrale adverse n'a toujours personne à surveiller. Le milieu relayeur stéphanois ne relaye pas le ballon, mais monte avec, profitant du fait que la défense recule suite à l' appel de Diony :


Pour une fois, il ne joue pas à gauche avec Bouanga, mais il cherche Boudebouz à droite. Malheureusement, sa passe est interceptée.


Même à 10, avec seulement deux milieux axiaux, les remontées du ballon stéphanoises sont passées par cette présence entre les lignes qui a le but de relayer le ballon vers les attaquants. Par exemple, à la 84e minute, Moulin envoie le ballon à gauche :


Il parvient jusqu'à Kolodziejczak, qui peut jouer plus haut dans le couloir avec Bouanga, ou revenir en arrière avec Saliba. Mais Dioussé se projette et offre une solution dans le dos des milieux adverses. Il est trouvé...


... et monte avec le ballon avant de lancer Abi en profondeur dans le couloir gauche. Malheureusement, son centre est trop long et ne peut pas être repris...



Conclusions


Il manque toujours un petit brin de réussite aux Verts, et sans lui, ils glissent peu à peu vers le bas du classement. Mais il y a clairement des motifs d'espoir, des ingrédients importants sont bien présents. Une approche tactique calée sur les forces des joueurs aptes, avec des solutions proposées entre les lignes. De l'envie, des duels gagnés, un jeu collectif cohérent, à défaut d'être flamboyant. Et même s'ils concèdent toujours l'ouverture du score sur la première demi-occasion adverse... les Stéphanois sont maintenant capables de revenir dans le match. Il est temps maintenant d'utiliser tous ces ingrédients pour enfin retrouver le goût de la victoire en championnat...

vendredi 6 mars 2020

ASSE - Rennes, 2-1 (Kolodziejczak, Boudebouz)

On est, on est, on est en finale !


Les Verts se sont qualifiés pour leur première finale de Coupe de France après 38 ans. Au terme d'un match complet, surtout la première période, et un but à la fin du temps additionnel. Un but qui a libéré tout le peuple vert, joueurs et spectateurs faisant ensuite la fête sur la pelouse.

Les Stéphanois ont fait preuve d'envie et de maîtrise. Ils ont gardé la confiance malgré l'ouverture du score concédé sur penalty contre le cours du jeu. D'un point de vue tactique, le choix du staff a été très logique, compte tenu des points forts des joueurs à sa disposition, un 4-3-3 :


Deux latéraux (Debuchy et Kolo) qui peuvent/savent monter quand il faut, mais qui sont plutôt défensifs, pas comme Maçon ou Trauco (sur le banc, Silva et Palencia n'entrant toujours pas dans les plans de Puel). M'Vila n'a pas à monter trop haut dans ce système, il peut rester à la hauteur de la défense quand on construit, ce qu'il aime le plus (meneur de jeu reculé). Deux relayeurs (Cabaye et Camara) qui se projettent offrirait deux solutions entre les lignes.

En phase offensive, on peut à la fois passer sur les côtés (2 joueurs dans chaque couloir), avec un appui sur un milieu relayeur. Et aussi M'Vila aura des solutions de passe verticales dans l'axe, pour casser la ligne des milieux.  Un autre avantage de ce système est qu'en phase défensive on est en 4-1-4-1. Le 4-4-2 marche très bien quand c'est un vrai bloc équipe, discipliné. On minimise souvent l'importance du premier rideau dans ce système : ils doivent à eux 2 empêcher toute relance propre de la part des deux centraux + sentinelle adverse. Cabella avait un volume de course qui lui permettait d'être très bon à ça. Bouanga, Boudebouz ou Khazri sont très mauvais dans cet exercice. Donc si on joue avec un d'entre eux en soutien de l'AC, c'est comme si on jouait en 4-4-0 : tôt ou tard, le milieu prend l'eau. Tant qu'à faire, rajouter un milieu, c'est ce que Puel a fait, et ça a bien marché...


Retour maintenant à la Ligue 1 et à la lutte pour le maintien. Mais avec un moral retrouvé et un rendez-vous pris au Stade de France...

mardi 3 mars 2020

RCT - Stade Français, 19-18 (Rebbadj)

L'avant-match


Pour leur prochain match pendant le tournoi, les Toulonnais accueillent un Stade Français toujours en crise. Bons avant-derniers du championnat, les Parisiens n'ont gagné aucun match à l'extérieur cette saison et ont même l'habitude de rentrer les valises pleines. Sur papier, un match facile pour le RCT, mais qui devra quand-même se méfier : une contre-performance serait très mal venue avant deux semaines de pause...

Le match...


... voit le RCT en train de marquer son territoire dès le début, avec 3 pénalités obtenues en 5 minutes... et une touche à 5m ratée ! Le match s'est ensuite équilibré, avec des défenses qui ont clairement pris le dessus sur les attaques, ce qui a donné des longues séquences de jeu, stériles. Et de l'indiscipline, des deux côtés - les buteurs n'ont pas été en réussite, surtout côté parisien, ce qui a fait que le score n'a été que 6-3 à la pause.

Le Stade Français a écopé d'un carton jaune en début de la 2MT, mais les Toulonnais n'ont pas du tout profité, payant leurs approximations en touche (seulement 2 lancers sur 9 exploités à la 50e minute !). Alors que le score était à égalité, le RCT fait le break autour de l'heure de jeu, après une pénalité (assorti d'un autre jaune pour un Parisien) et un bel essai marqué par Rebbadj (voire ci-dessous). Mais les Toulonnais encaissent un essai à leur tour et Alainu'uese prend un jaune pour les 10 dernières minutes. Un deuxième essai encaissé après une longue action voit les Toulonnais passer derrière au score... et repasser devant avec une pénalité sur la sirène réussie par Carbonel !  

L'action


A l'heure de jeu, les Parisiens, en infériorité numérique, font du large-large sans réussir à franchir :


La défense toulonnaise est en place, avec Alainu'uese (5), Belleau (12), Savea (13) et Villière (11). Après un premier point de fixation, il y a un autre, dans la zone de l'ailier toulonnais, qui gratte le ballon. Il reçoit rapidement le soutien de ses coéquipiers et c'est un turnover, le RCT récupère la possession :


Takulua (9) sort le ballon pour Lakafia (7), qui ne joue pas avec ses avants qui sont à ses côtés (Setiano - 3, Parisse - 8, Frésia - 1, Rebbadj - 4), mais dans la zone de Carbonel (10), derrière eux. Sauf que c'est Cordin (15) qui surgit, récupère la passe et casse plusieurs plaquages pour avancer jusqu'à la ligne médiane. Frésia (1), déjà là, n'attend pas l'arrivé de son demi de mêlée pour sortir le ballon...


... et le donne à Parisse (8), qui fixe un peu plus la défense, pendant qu'un surnombre se met en place à l'extérieur. Malheureusement, la passe de Takulua (9) pour ses trois-quarts n'est pas précise...


... le ballon passant entre Belleau (12), Cordin (15) et Carbonel (10). Heureusement, Dridri (14) le récupère et sprinte au long de sa ligne de touche. Il évite un premier plaquage...


... et sert ensuite Carbonel (10), qui passe sur un pas pour fixer le dernier défenseur et envoyer Rebbadj (4) marquer le premier essai du match, après un turnover exploité à merveille.


La suite


Malgré l'écart au classement, ce match a été tout sauf simple pour le RCT, qui s'est donc imposé d'un petit point, sur la sirène. La faute principalement à une conquête très approximative, c'est seulement le manque de réussite des Parisiens face aux perches qui les a maintenu dans le match. Des aspects qui seront à travailler pendant les deux semaines de pause - sans vacances ! - qui attendent les Toulonnais. Avant de jouer leur dernier doublon à Clermont et de monter ensuite en puissance pour la fin de la saison et les phases finales.

lundi 2 mars 2020

Lyon - ASSE, 2-0

Un derby ?


Les Verts se sont logiquement inclinés lors de leur déplacement dans la banlieue stéphanoise, après une première période où ils n'ont pas mis les ingrédients nécessaires pour disputer un derby...


Non seulement les Stéphanois enchaînent les mauvais résultats, mais en plus leurs prestations à l'extérieur commencent à être régulièrement plombées par une première période catastrophique. A Brest, ils avaient complètement coulé en 1MT, avant de montrer un visage différent après la pause, sans arriver à combler le retard. Contre les Vilains, ils n'ont tout simplement pas existé sur la première moitié du match, avant de commencer à jouer au retour des vestiaires. Comme les souligne d'ailleurs Claude Puel dans son analyse d'après-match : "on a été inhibés. On était en bloc et c’était bien ce qu’il fallait faire devant cette équipe mais on a manqué de maîtrise sur les ballons qu’on a récupérés (...) on n’a pas été assez agressifs dans les duels pour gratter beaucoup de ballons. Après la pause, on s’est lâchés, on a pressé haut et on a montré qu’on pouvait être acteurs".

Voici quelques exemples de ce triste derby...


1MT : Inexistants


Pour ce match, le staff stéphanois a fait le choix d'un 4-4-2, avec un duo Bouanga-Diony devant :


M'Vila et Cabaye ont formé la paire des milieux axiaux, pendant que Honorat et Trauco ont été les milieux excentrés. Les adversaires du jour ont abordé ce match en 4-3-3, avec un trio au milieu très mobile, qui a posé énormément de problèmes. Leurs appels dans le bloc stéphanois mériteraient presque une analyse, mais comme on ne veut pas se concentrer sur les vilains aspects de ce match, regardons de plus près la réponse des Verts.

Comme par exemple à la 18e minute, quand les Vilains commencent une attaque à droite :


Côté ASSE, le bloc en 4-4-2 est en place et couvre bien le triangle des milieux adverses. Trauco sort sur son adversaire direct, qui joue en arrière :


Un des milieux relayeurs se projette dans le couloir droit, suivi par M'Vila et Kolo. Le défenseur central essaye une transversale pour changer de côté, bien lue par Debuchy qui dégage de la tête. Mais le ballon est tout de suite récupéré et les Vilains reconstruisent sur la ligne médiane :


Le bloc stéphanois se remet en place. Le premier rideau empêche la progression du milieu défensif, pendant que les deux autres sont surveillés : un se trouve entre les lignes, pendant que l'autre est pris par Trauco. Sur l'image précédente c'était Honorat qui faisait la même chose du côté opposé - la ligne des Verts coulissait très bien, il n'y avait jamais beaucoup de place entre les milieux axiaux pour que le ballon puisse passer. Mais tout change quand un défenseur central amène du surnombre en montant avec le ballon :


Le premier rideau, formé par Diony et Bouanga, aurait du intervenir, mais les deux se concentrent sur le milieu défensif. Cabaye sort donc de sa ligne pour arrêter la progression du défenseur, et le décalage est fait :


L'adversaire qui se trouvait dans son dos est trouvé, et il joue en arrière avec son compère du milieu : non seulement Diony et Bouanga n'ont pas coupé le progrès du défenseur, ils n'ont pas suivi cet adversaire non plus... Et avec trois passes, le bloc stéphanois est transpercé, le ballon arrive à l'ailier droit. Qui perd le contrôle du ballon...


...  sous la pression de Kolo, M'Vila et Trauco. Le ballon arrive ainsi à Bouanga, qui essaye de partir en contre, mais c'est quasiment mission impossible :


Les Verts défendait si bas, qu'à la récupération du ballon, l'attaquant stéphanois se trouve seul contre 4 adversaires. Il tente un tir de loin, sans aucun danger.


Ce qui rend encore plus frustrante la manière dont les Verts ont subi le jeu en 1MT est l'impression qu'il y avait de la place. Quand ils ont (rarement!) construit proprement, ils ont été capable de trouver des décalages :


A la 32e minute, Debuchy joue une touche avec Cabaye et le ballon parvient jusqu'à Kolo, sur le côté opposé. Le latéral gauche remet dans l'axe...


... et la disposition offensive des Verts est bien visible sur cette image. L'axe du terrain est complètement déserté, le trio des vilains milieux ne sert pas à grande chose. Le jeu passera forcément sur un côté. M'Vila et Cabaye échangent des passes et le ballon arrive à Fofana :


L'excentré gauche adverse anticipe une passe vers Debuchy, mais c'est Honorat qui reçoit le ballon, dans le couloir droit. Non seulement le bloc adverse a été facilement contourné, mais les milieux ne reviennent même pas pour aider leurs 4 défenseurs :


Honorat avance balle au pied, la défense suit les appels de Diony et Bouanga, pendant qu'à l'opposé Trauco et Kolo font des grands signes, étant complètement libres. Ils sont recherchés par la passe d'Honorat, mais Bouanga "intercepte" et tire en première intention, annulant ainsi le décalage créé dans son dos. Une frappe trop molle pour inquiéter le gardien...


Ce genre d'attaque a été très rare en 1MT, les Verts étant complètement privés du ballon. Ils ont fini la période avec seulement 22% de possession - le plus faible pourcentage d'une équipe sur une période cette saison. Leur bloc a été baladé sans arrêt d'un côté à l'autre et quand ils arrivaient parfois à récupéré le ballon, ils n'arrivaient pas à l'exploiter - à la demi-heure de jeu, plus d'une passe sur deux été ratée par les Stéphanois...


2MT : Des intentions


Des changements importants ont été effectué à la pause. Tactiquement, le staff stéphanois a choisi de résoudre le problème du milieu :


Le rideau de deux devant n'empêchant pas la construction adverse, Bouanga a été excentré à gauche, Trauco est passé dans l'axe pour former avec Cabaye et M'Vila un triangle pointe basse qui a défendu plus facilement contre les milieux adverses.

Mais le plus gros changement a été dans l'attitude des joueurs. Ils ont enfin commencé à jouer un Derby, affichant la motivation et l'intensité nécessaires. Comme on peut l'apercevoir dans cet exemple à la 57e minute, quand les Vilains essayent de construire de leur propre moitié..


... et Honorat déclenche un pressing sur le latéral gauche, suivi de ses coéquipiers, qui se jettent tous sur leurs adversaires, pas forcément d'une manière coordonnée :


Cabaye et Diony sur un défenseur, qui arrive à décaler vers un autre (cherché par Bouanga), qui arrive à jouer avec un milieu, cherché par Trauco...


... et Cabaye récupère le ballon. Il joue avec Diony, qui lance en profondeur Bouanga. L'attaquant stéphanois s'enferme dans un angle et voit son tir repoussé en corner, mais l'essentiel n'est pas là. Les Verts ont affiché un visage différent lors de cette deuxième période, un visage qui méritait probablement mieux.

Malheureusement, les quelques occasions créées n'ont pas été converties. Ils sont restés dans le match grâce à trois arbitrages vidéos favorables - chose assez rare pour être soulignée - et les changements effectués à partir de la 70e minute n'ont pas suffisamment incliné la balance de leur côté :


Boudebouz est rentré à la place d'Honorat, dans le couloir droit et Abi à celle de Trauco : les Verts sont repassés dans un 4-4-2, mais comme ils gagnaient leurs duels et gardaient le ballon, ils n'ont pas subi comme en première période.

Il n'y a pas eu de troisième changement, il n'y avait plus aucun autre joueur offensif sur la feuille de match pour l'ASSE...


Conclusions


Il est difficile de dire qu'est-ce qui est le plus inquiétant dans la situation actuelle. La lente descente au classement, avec la place de barragiste de plus en plus proche ? L'incroyable série des matchs sans victoire - et surtout des défaites - en championnat ? Ou le fait que l'équipe se met à jouer seulement à réaction, seulement après avoir été baladée pendant toute une période ? Si on regarde la 2MT des deux derniers déplacements, à Brest et à Lyon, il y a clairement de l'espoir : des joueurs concernés, qui se battent avec leurs armes et qui, grâce à des changements tactiques pertinents, arrivent à prendre le dessus de leurs adversaires, ou au moins à faire match égal avec eux. Il n'y a plus qu'à trouver comment faire pour commencer directement comme ça, et non seulement quand c'est trop tard...