lundi 30 avril 2018

RCT - Castres, 59-13 (Tuisova x2, Isa, Nonu, Bastareaud, Matthewson, Lakafia)

L'avant-match


Il ne reste plus que deux matchs à disputer avant la fin de la phase régulière du Top 14 et le RCT a son destin en main, et une belle fin de saison passe par une victoire lors de cette réception de Castres. Un véritable 8e de finale, dans un Mayol à guichets fermés qui fera ses adieux à des nombreux joueurs qui arrêtent cette saison. Tout est réuni pour une belle fête, espérons qu'elle ne soit pas gâchée.

Le match...


... n'en a pas été un, et ça a été évident très tôt. Après le premier essai de Tuisova, les Toulonnais se sont fait un peu peur tout seuls (en mettant le pied en touche après la réception d'une chandelle, en dégageant directement en touche, etc.), mais ils été quand-même en contrôle du match. Un essai en force d'Isa et un autre de Nonu, après deux mêlées, ont donné le bonus offensif dès la demi-heure de jeu. Deux autres essais, de Tuisova et Bastareaud, avant la pause et les équipes sont rentrées aux vestiaires au score sans appel de 38-6...

La 2MT a eu du mal à démarrer, le RCT ayant levé le pied. Dans le jeu, mais pas sur la mêlée, les Toulonnais explosant à plusieurs reprises le pack adverse, qui a concédé pas moins de 8 pénalités (dont 6 en 2e période) avant d'encaisser un jaune à la 69e minute. Ironiquement, c'est suite à cette action que Castres marque un essai sur un turnover dans leurs 22m et une longue action avec plusieurs plaquages ratés. Ça a eu l'effet d'un réveil pour les Toulonnais, qui ont de nouveau accéléré pour marquer 3 autres essais dans les 5 dernières minutes, par Matthewson (après un jeu de pied adverse), Ashton (offrande de Radradra après un beau franchissement après une mêlée à 50m) et Lakafia directement après la remise en jeu du dernier essai. Bref, une démonstration du RCT devant un Castres inexistant.

L'action


On joue la 36e minute et Nonu vient de marquer le 3e essai toulonnais. Le RCT est déjà de retour sur les 22m adverses avec un lancer à suivre pour Etrillard (2) :


L'alignement n'est pas complet, Escande (9) et Isa (7) ne s'y trouvent pas. Kruger (5) capte le ballon, le donne à Lakafia (6)...


... qui sort pour Escande. Les Toulonnais commencent à se placer sur l'extérieur, Nonu (12) et Isa (7) proposent une première solution, pendant que Belleau (10) se déplace vers le large.


Le centre toulonnais fixe la défense et sert dans son dos Escande, qui avait continué à suivre l'action. C'est au tour de Bastareaud (13) de proposer une solution...


... mais c'est un leurre qui fixe la défense, c'est Belleau (10) qui est servi et un décalage commence à être créé à droite, avec Tuisova (14) et Ashton (15). Il n'y a rien à dire, la défense adverse a bien suivi et deux défenseurs prennent les deux trois-quarts toulonnais :


Mais ce n'est pas suffisant, Tuisova passe entre les deux et va tout droit pour marquer le 4e essai du RCT, d'une simplicité absolue.

La suite


La phase régulière est presque finie et la dernière journée n'est plus très importante pour le RCT. Grâce à cette victoire bonifiée et aux autres résultats, les Toulonnais sont assurés de disputer un barrage à domicile. Il est très improbable qu'une qualification directement en demis soit possible, alors le match à Pau sera plutôt une répétition des gammes pour les phases finales.

dimanche 29 avril 2018

Montpellier - ASSE, 0-1 (Hamouma)

Le choix de souffrir


Les Verts ont subi les attaques adverses à Montpellier, mais ils ont bien défendu. Et à la fin ils ont de nouveau gagné, ce qui reste le plus important dans le sprint final. 

"Victoire laborieuse" - c'est comme ça que le coach stéphanois décrit le résultat qui voit son équipe se hisser à la 5e place du classement. Ça n'a pas été facile, c'est sûr, mais c'était un choix tactique ("on avait décide de se mettre un peu plus bas car on savait que Montpellier allait pousser"). Et avec une ouverture du score précoce et un Ruffier toujours très bon en dernier rempart, ça a été un choix payant. Mais avant de regarder l'opposition tactique entre les deux équipes, quelques statistiques sont particulièrement intéressantes.

Les chiffres ne sont pas tendres avec les Verts. Pas moins de 25 tirs subis (certes, très souvent de loin, sans aucune conviction) et une possession surprenante. Si elle a été équilibrée lors de la 1MT (50%), l'ASSE a eu seulement 29% de possession en 2MT. De la part d'une équipe qui tourne à une moyenne de 50% (bien plus les derniers mois), c'est presque choquant. C'était peut-être un choix, Montpellier n'étant pas habitué à avoir le ballon et l'ASSE préférant le jeu en contre. On le voit d'ailleurs dans le choix d'abuser des dégagements de Ruffier (87% de ses passes, contre seulement 60%), malgré le très faible rendement (25% réussis, contre 40% en moyenne). Et quand on rajoute le faible pourcentage des passes réussies par Cabella en 2MT (71% contre une moyenne de 82%), on comprend mieux que les Stéphanois n'ont rien construit et ont subi attaque après attaque. 

1MT : contre un 3-5-2


Si on analyse le match d'un point de vue tactique, Montpellier a démarré la partie dans son désormais classique 3-5-2 : non seulement les Verts ont su le bloquer, mais ils ont aussi appuyé là où ça fait mal pour ouvrir le score.

Les deux systèmes en place sont visibles dès le début du match :


On peut ainsi voir le 4-4-2 défensif de l'ASSE et les 3 défenseurs centraux, 3 milieux axiaux et 2 milieux latéraux (les "pistons") de Montpellier. Leurs 2 avant-centres se placent dans la défense, occupant 3 défenseurs : c'est Gabriel Silva qui a le rôle d'aider ces centraux, donc Debuchy est en charge du milieu gauche. Ce qui laisse donc le milieu droit à la charge de KMP. Le ballon est passé entre les défenseurs et la sentinelle adverse, sans solutions :


Le bloc stéphanois est bien en place : les couloirs sont couverts par Debuchy et KMP et le triangle au milieu de Montpellier est en infériorité numérique. Pour les adversaires, la seule possibilité de construire une attaque est de faire monter un ou deux de leurs défenseurs, ce qu'ils ne veulent pas faire pour ne pas se découvrir.

Cette attaque ne donne rien qu'un long ballon balancé vers les attaquants, sans autres options. Et une minute plus tard, une autre attaque de Montpellier :


Un des avant-centres essaye de créer un décalage en s'excentrant sur la gauche, mais Debuchy et KTC ont suivi. Il essaye donc de changer de côté, mais KMP a bien suivi son adversaire direct (Gabriel Silva aidant toujours dans l'axe) et intercepte la passe. Le ballon arrive à M'Vila, qui ne déclenche pas un contre, mais préfère temporiser pour construire proprement :


Avec Selnaes et Cabella, le ballon arrive à droite à Debuchy, pendant que KMP se replace en attaque...


... du même côté que Hamouma, où il est trouvé par la passe lobbée de Debuchy. Sur cette image on peut voir comment les trois éléments offensifs des Verts (Hamouma, Beric, KMP) se placent en duels 1-contre-1 avec les trois défenseurs adverses. KMP préfère revenir en arrière avec Selnaes...


... qui demande à M'Vila d'envoyer le jeu côté gauche. Tout le monde coulisse vers ce côté, ce qui laisse Cabella et Debuchy libres à droite. Le centre du latéral stéphanois au deuxième poteau est repoussé en touche par la défense et Gabriel Silva effectue la remise en jeu :


M'Vila reçoit le ballon et on peut observer un alignement 3-contre-3 entre les milieux axiaux des deux équipes. Sauf que Cabella fait un appel entre les lignes et reçoit la belle passe de M'Vila, pendant que pour Montpellier le milieu latéral sort sur Gabriel Silva...


... ce qui laisse sa défense centrale en infériorité numérique. Beric, KMP et Hamouma sont de nouveau placés dans l'axe. Et comme Cabella a passé la ligne des milieux, un défenseur central doit sortir : un autre marque Beric et le 3e se retrouve seul avec KMP et Hamouma. Le premier participe au un-deux avec Cabella et le deuxième est donc libre dans l'axe pour recevoir la passe et ouvrir le score. Le milieu latéral gauche de Montpellier a été naïf sur cette action, mais s'il avait serré dans l'axe, Debuchy aurait été seul au deuxième poteau...

Rien que sur cette double attaque stéphanoise, on voit que les Verts savaient comment mettre à la faute la défense adverse, en obligeant les défenseurs à se trouver dans des duels individuels, où l'avantage technique était du côté de l'ASSE... 

2MT : contre un 3-4-3


L'ASSE n'a pas continué à pousser, laissant Montpellier casser ses attaques dans le bloc stéphanois. Et comme ils avaient du mal à créer des décalages, leur staff a procédé à un ajustement tactique assez tôt en 2e période : dès la 55e, le latéral gauche a été remplacé par un joueur avec un profil plus attaquant, qui a souvent abandonné son couloir pour un milieu central qui s'excentrait. Par exemple :


Le 4-4-2 défensif stéphanois est toujours là, tout comme les 2 avant-centres dans la défense. Si le piston droit est dans son couloir, sous la responsabilité de KMP (Gabriel Silva toujours dans l'axe), le gauche entre dans l'axe, obligeant Debuchy de serrer aussi. C'est donc un milieu central qui s'excentre à gauche, en "piston" et il doit être pris par Bamba (entré à la place de Hamouma, monté en avant-centre à la place de Beric, sorti).

On peut clairement parler d'une réorganisation tactique pour Montpellier, qui passe de 3-5-2 à 3-4-3. Pour mieux comprendre pourquoi on a souffert suite à ce changement, on regarde un autre exemple :


Le jeu est envoyé de la défense centrale à droite, au milieu latéral pris par KMP. Le bloc stéphanois est bien en place est on peut très bien voir les trois défenseurs KTC-Subotic-Silva bien serrés autour des deux attaquants et Debuchy qui se fait amener dans l'axe par le milieu latéral gauche. Un appui sur un avant-centre, une passe en retrait à un milieu axial qui organise le jeu...


... et le décalage est créé dans le couloir gauche, où le milieu central devenu piston est libre dans le dos de Bamba. C'est donc Debuchy qui doit sortir le bloquer, laissant ses coéquipiers en déséquilibre dans la surface, en 4-contre-4. Ce genre d'attaque a été répétée a des nombreuses reprises en 2MT, Bamba ayant du mal à bloquer son couloir, mais la défense stéphanoise a été héroïque, repoussant tous les ballons - dans cet exemple, c'est Debuchy qui contre le centre, concédant le corner.


Conclusions


Les Verts ont été très bien tactiquement en première période : ils ont su déséquilibrer leurs adversaires et bien bloquer leurs attaques une fois le score ouvert. En deuxième période, par contre, les Stéphanois ont souffert, le changement tactique de Montpellier a été pertinent. Et finalement le choix d'abandonner le ballon et de défendre bas a été payant, malgré les nombreux contres mal exploités. 13 matchs sans défaite, 5e victoire en 6 matchs (plus un nul contre Paris), 3 victoires consécutives, l'ASSE est en train de réussir un sprint final de malade, se plaçant déjà à la cinquième place à trois journées de la fin du championnat.

lundi 23 avril 2018

ASSE - Troyes, 2-1 (Beric x2)

Coaching gagnant


Si les Verts ont été muselés par le bloc adverse en première période, ils ont su trouver les réponses tactiques à la pause pour se défaire du piège troyen et continuer leur course pour l'Europe.


Ce n'est jamais simple de jouer contre une équipe qui joue sa survie en Ligue 1, venue défendre à tout pris, dans un bloc bas et compact, qui ne joue même pas les contres à fond, surtout après avoir ouvert le score très tôt. Ça aurait pu être un piège, un sacré coup d'arrêt dans le sprint final, mais les Stéphanois ont fini par trouver les réponses tactiques. Il n'y a pas de magie, contre ce genre de bloc défensif la solution est de passer par les côtés, de contourner le bloc. Sauf qu'il y a plusieurs manières de s'y prendre, et les exemples suivants nous en montrent deux, une clairement mieux adaptée que l'autre à ce que Troyes proposait.

Avant la pause


Pour comprendre l'animation offensive stéphanoise en 1MT, on regarde une relance qui part de Ruffier, vers KTC et Debuchy sur la droite :


Sur cette image on voit triangle pointe haute de l'ASSE (M'Vila - Diousse / Cabella) et sur l'image suivante le bloc en 4-4-2 de Troyes :


Le ballon circule de droite à gauche, Debuchy-KTC-Diousse-M'Vila-Silva, pour essayer de contourner ce bloc. Il n'y a pas d'espace entre les lignes, le jeu doit passer par les côtés, surtout que Ntep est bien collé à la ligne de touche sur la gauche. Les Troyens coulissent bien vers ce côté...


... ce qui oblige Gabriel Silva de jouer en arrière avec M'Vila, qui donne le ballon à Cabella, qui a du sortir du bloc adverse pour pouvoir toucher le ballon. La présence stéphanoise est très faible dans les deux lignes de 4 de Troyes, le milieu stéphanois doit d'abord passer le premier rideau de deux :


Ils y arrivent grâce à un beau un-deux entre Cabella et Diousse, le premier passant ensuite le ballon à Gabriel Silva qui pique vers l'intérieur, laissant la ligne de touche à Ntep. Le latéral de l'ASSE combine avec Cabella, qui s'est excentré...


... et le ballon parvient enfin jusqu'à Ntep. C'est un jeu dans un petit périmètre à gauche, mais sans aucun décalage créé, les Troyens sont présents en nombre... et les Stéphanois sont toujours en infériorité numérique dans l'axe. Ntep choisit d'aller vers l'intérieur...


... où il trouve Bamba, qui combine avec Diousse. Il n'y a vraiment pas la place (ou de présence stéphanoise) pour passer dans l'axe, alors le jeu est envoyé de nouveau à gauche, pour Cabella :


Sauf que rien n'a changé : le jeu est très aggloméré sur le côté, les Verts sont en infériorité numérique dans l'axe et même Debuchy est surveillé de près sur le côté opposé. Si on compte attentivement, on s’aperçoit que tous les joueurs de Troyes se trouvaient entre les 16 et les 25 mètres de leur moitié du terrain, rendant vraiment difficile l'animation offensive stéphanoise. La suite de l'action est un centre sans conviction de Cabella, facilement repoussé par la défense adverse.

Après la pause


L'entrée après la pause de Beric à la place de Diousse a été accompagnée d'un changement de système pour l'ASSE (KMP pour Ntep c'était du poste pour poste). Mais quel a été le nouveau système utilisé par les Verts ?

Du 4-4-2 losange ? 

C'est ce que les commentateurs télé ont cru apercevoir et c'est ce que cette image peut faire croire :


Cependant, ça a été très rare de voir Cabella en pointe haute d'un losange au milieu du terrain. Et il est difficile de trouver une séquence de jeu avec un bloc stéphanois en place, les Troyens ne construisant quasiment aucune attaque. En même temps, quand tu passes ton temps à te rouler par terre, il est difficile d'avoir la possession du ballon...


Non, du 4-4-2 à plat 3-1-4-2

Au fait, Cabella n'était pas la pointe haute d'un losange, il formait avec M'Vila la paire des milieux axiaux de l'ASSE dans un 4-4-2 "à plat". Sauf que ce 4-4-2 n'avait rien de classique : pas d'alternance au milieu, il y avait toujours le même milieu axial qui montait (Cabella) et l'autre qui restait bas (M'Vila). Mais surtout, le positionnement de Bamba et KMP était très axial et pas du tout excentré, comme on peut l'apercevoir sur cet exemple : 


Debuchy joue une touche pour Bamba, qui passe en retrait à M'Vila, qui joue avec son partenaire au milieu, revenu à la même hauteur. Cabella avance avec le ballon...


... et écarte avec Gabriel Silva à gauche, qui lance KMP en profondeur. Et sur cette image on peut clairement voir le positionnement axial de Bamba et KMP, qui abandonnent les couloirs pour les latéraux.


Pour faire simple, l'ASSE évoluait dans un 4-4-2 avec deux attaquants, deux milieux supposés excentrés, mais qui jouaient dans l'axe, deux latéraux placés très haut, seuls dans leurs couloirs, et deux milieux axiaux qui ne sont pas sur la même ligne, un offensif et l'autre à hauteur de la défense. Autrement dit, ça ressemble à un 3-1-4-2 (3-5-2 avec un triangle pointe-basse au milieu).

Les raisons de l'utilisation de ce système deviennent plus claires lors d'un autre exemple, qui commence avec un coup franc joué par M'Vila :


Via Subotic, le ballon est envoyé sur le côté opposé, à Debuchy, pendant que le triangle pointe-basse du milieu stéphanois est très évident (Cabella / Bamba-KMP). Le positionnement de Cabella est particulièrement intéressant : comme il n'y a pas d'espace entre les deux lignes de 4 de Troyes, il se place entre la première ligne de 2 et la ligne des milieux. Il est trouvé une fois par KTC...


... qui avait reçu le ballon de Debuchy et qui le reçoit de nouveau de Cabella. Pendant ce temps, Hamouma et Beric se placent dans la défense, KMP dans l'axe et Bamba s'écarte sur le côté. Mais quand le jeu est déplacé vers la gauche, Bamba repique dans l'axe de nouveau....


... tout comme Cabella, qui se place intelligemment pour recevoir la passe de M'Vila, qui casse le premier rideau. Ce n'est pas anecdotique, le bloc de Troyes est toujours serré, avec deux lignes de 4. Mais Cabella est face au bloc et il a le temps et la place pour bien orienter le jeu, surtout que le positionnement de KMP et Bamba a bien serré la ligne des milieux et le double-appel de Beric et Hamouma fait la même chose avec la ligne des défenseurs :


Sur cette image on voit mieux le (3-)5-2 de l'ASSE, avec des couloirs complètement libérés pour Debuchy et Gabriel Silva. C'est le premier qui est choisi par Cabella, mais son centre est repoussé en corner. Néanmoins, tout ce qui ne marchait pas tactiquement en première période a été gommé : les Verts cherchent toujours à passer dans les couloirs, mais en prenant soin de les libérer d'abord. Et Cabella est enfin placé face au jeu pour pouvoir l'orienter : s'il n'a pas la place entre deux lignes, il est maintenant entre deux autres, dans l'axe, pas sur un côté. Quant à la présence dans l'axe, au moment des centres, les 4 offensifs se trouvent généralement dans la surface, prêts à les recevoir.

Conclusions


Si l'idée de base a été la même lors des deux mi-temps (grosse possession et contournement du bloc adverse par les côtés), les Verts de Jean-Louis Gasset s'y sont pris différemment après la pause. Certes, les buts sont venus suite à un coup-franc et un contre, et non directement suite à ce changement tactique. Et les Troyens étaient si fatigués en fin de match (on peut voir à plusieurs reprise leur sentinelle se tenir les mains sur les genoux, en train de reprendre son souffle), que leur bloc avait volé en éclats et les notions tactiques n'étaient plus très importantes. N'empêche, ce n'est jamais facile de jouer contre ce genre d'équipe, surtout après avoir encaissé un but. Et l'adaptation tactique à la pause a été une des clés de cette victoire, qui continue la série d’invincibilité stéphanoise et qui place l'ASSE sur une place européenne à seulement quatre journées de la fin du championnat.

vendredi 20 avril 2018

L'objectif des Toulonnais (4)

L'objectif du RCT cette saison est d'enfin gagner quelque chose, après 3 ans sans trophées. Et comme en Coupe d'Europe les saisons se suivent et se ressemblent - 2e de la poule, éliminés lors d'un quart à l'extérieur - il ne reste plus que le Top 14. Les Toulonnais ont pris l'habitude d'échouer en finale du championnat les dernières années, mais il faudra d'abord y parvenir jusqu'à là. Quelles sont donc les conditions pour se qualifier pour les phases finales, et à quelle place ?

Les calculs


Le RCT a 6 points de plus que la 7e place : une victoire lui suffit pour jouer les phases finales. Mais est-ce qu'elle serait suffisante pour un barrage à domicile ? Pour cela, il faudrait :
  • que la victoire soit contre Castres
  • une défaite de Lyon, soit à Oyonnax, soit contre Montpellier


Le RCT a 2 points de plus que la 5e place : deux victoires lui suffisent pour jouer un barrage à domicile. Mais est-ce qu'elles le qualifieront directement en demi-finales ? Pour cela, il faudrait :
  • une défaite du Racing 92 à Bordeaux lors de la prochaine journée. Si bonus pris, alors un bonus pour le RCT aussi
  • une défaite du Stade Toulousain contre La Rochelle ou à Clermont - un bonus pour le RCT serait assez


Conclusions


Pour faire simple, les Toulonnais doivent gagner à domicile contre Castres. Ils seront alors mathématiquement qualifiés pour les phases finales et, en fonction d'autres résultats, ils pourront chercher quelque chose de plus lors à Pau. Avec une victoire en plus:
  • ils seront assurés d'un barrage à domicile (même sans un faux pas de Lyon)
  • un double faux pas de Toulouse ou Racing leur permettrait de se qualifier directement en demi-finales
  • si seulement le Racing se plante, lors de l'avant-dernière journée, la 3e place reste quand-même plus intéressante que la 4e : éventuelle demi-finale contre Toulouse, pas contre Montpellier.



mercredi 18 avril 2018

RCT - Montpellier, 32 - 17 (Ashton, Radradra, Bastareaud, Isa)

L'avant-match


Cette délocalisation est un match charnière pour le RCT, la victoire est obligatoire dans la course aux phases finales. Mais l'adversaire du jour est l'impressionnant leader du championnat, le match s'annonce très difficile pour les Toulonnais, qui peuvent le considérer comme une répétition pour les demis ou la finale : il y a des fortes chances de recroiser la route du voisin montpelliérain encore une fois s'ils veulent aller au bout et chercher le Bouclier.

Le match...


... débute en sens unique, avec deux essais toulonnais dans les premiers 10 minutes. D'abord Ashton qui bat le record d'essais après une mêlée dans la moitié du RCT et du large-large et franchissements tout en maîtrise. Et ensuite Radradra, sur une touche rapidement jouée de nouveau dans la propre moitié - avec en bonus un carton jaune pour Montpellier et la sortie de Trihn-Duc blessé à l'épaule. Guirado sort aussi sur blessure, ce qui gâche un peu le plaisir donné par le 3e essai toulonnais marqué par Bastareaud une minute plus tard, après une touche sur les 22m adverses et une passe au pied de Belleau. Le bonus offensif est virtuellement acquis dès la 20e minute, on aurait pu se diriger vers une démonstration du RCT, mais un léger relâchement est vite puni et les adversaires marquent un essai suite à une mêlée et 3 plaquages ratés. Les Toulonnais ont heureusement une réaction d'orgueil juste avant la pause pour marquer un 4e essai (voire plus bas).

Par contre, la 2MT n'a rien à voir avec la 1e. Le RCT n'attaque plus, se contente de défendre, et le fait plutôt bien, essayant de punir Montpellier sur des contres. Ils arrivent jusqu'aux 22m adverses à plusieurs reprises, ils récupèrent des ballons sur les lancers adverses, ils obtiennent plusieurs pénalités sur des mêlées... mais ils ne marquent pas. Et ils finissent par encaisser un autre essai à la 60e sur une pénalité vite jouée et un 3e en fin de match sur un dégagement contré. La victoire est assurée, mais sans le bonus - on aurait tous signé pour ce résultat avant le match, mais il reste un sentiment de regret après la belle première période.

L'action


Le chrono affiche la fin de la 1MT, mais la mêlée montpelliéraine dans leurs 22m doit être jouée :


Ils sortent le ballon à l'aile, où le demi d'ouverture et l'ailier essayent de combiner. La défense du RCT avait bien coulissé et arrête l'attaque avant la ligne des 40m :


Un point de fixation d'un 3e ligne, puis un autre ruck et les joueurs de Montpellier se mettent à la faute. Pénalité pour le RCT, que Belleau a le droit de jouer en touche (?) :


Le lancer d'Etrillard (2) à l'entrée des 22m est capté par Lakafia (6). Alignement complet, avec Isa (7) en relayeur, le maul est enclanché par les Toulonnais et avance un peu, suffisament pour obtenir une faute :


L'arbitre laisse jouer l'avantage et Isa profite pour s'echapper jusqu'aux 5m. Le ballon est sorti pour les trois-quarts :


Bastareaud (13) est un leurre, Belleau (10) sert Nonu (12) dans son dos. Le centre a Bonneval (15) et Ashton (14) à sa droite, il joue avec eux :


Une passe sautée pour l'ailier, qui remet à l'intérieur pour son arrière, qui malheureusement est mis au sol avant d'applatir. L'arbitre revient à la pénalité...


... qui est vite jouée à la main par Bastareaud, à 2:30 dans le temps additionnel - les joueurs du RCT ne veulent pas rentrer aux vestiaires. Le capitaine toulonnais est mis au sol, le ballon est éjecté par Escande (9)...


... pour un premier groupe d'avants. Kruger (5) reçoit le ballon, fixe, passe après contact à van der Merwe (3), qui est protégé au sol par Attwood (4). Escande sort de nouveau très vite...


... pour un autre groupe d'avants. Sa passe saute Isa (7) pour envoyér Vermeulen (8) au contact. Mais l'Argentin récupère le ballon dans le ruck qui suit et arrive à applatir sur la ligne le 4e essai des Toulonnais. Celui qui leur permet d'obtenir de nouveau le bonus offensif, à la pause... bonus qu'ils n'arrivent pas à conserver par la suite.

La suite


C'est dans deux semaines, la faute à la défaite au Munster. Les Toulonnais profiteront pour recharger les batteries et faire des calculs et simulations pour les phases finales. Même si cette victoire était nécessaire, elle n'est pas suffisante pour la qualification, les faux pas ne seront pas permis lors des deux matchs qui restent.

dimanche 15 avril 2018

Strasbourg - ASSE, 0-1 (Debuchy)

Les trois points


Comme la manière n'a pas été au rendez-vous, ce qu'on va retenir du match à Strasbourg, c'est le résultat. Parce qu'après tout, dans la course à l'Europe, l'important, c'est bien les trois points...


Le coach stéphanois est assez lucide dans son analyse après le match : "dans l'envie et le comportement, il y a besoin de resserrer quelques boulons. Après Paris, peut-être qu'on était venu faire une démonstration et Strasbourg nous a sacrément secoués. (...) Techniquement, on a été très faible et physiquement on s'est fait manger. Dans les duels, on a été laminé". En effet, les Verts avaient fait preuve d'une belle maîtrise technique et tactique lors du précédent match, contre Paris, mais surtout d'une grosse envie. Ces ingrédients ont manqué contre les Alsaciens... ou peut-être tout est relatif, l'ASSE en voulait plus que le PSG, mais moins contre un Strasbourg en lutte pour éviter la descente. 

Si on parle stats, le pourcentage des passes réussies est révélateur, surtout pour les deux pièces maîtresses au milieu du terrain : contre le PSG, M'Vila et Cabella ont chacun réussi 92% de leurs passes. Contre Strasbourg, le premier seulement 84% et le deuxième seulement 80%. La différence est importante, surtout qu'il y a plus des passes stéphanoises lors du 2e match - toutes ces passes ratées sont des offensives de l'ASSE qui ne sont pas allées au bout. Malgré cela, il y a eu quelques attaques bien préparées par les Verts et dans la suite de l'article, on regarde deux exemples qui partagent deux caractéristiques : ils commencent avec un coup franc joué par M'Vila et incluent un appel en profondeur d'un latéral dans son couloir. Mais avant ces deux offensives, un petit retour sur l'utilisation de certains joueurs à des postes différents.

Même système, peu importe les joueurs


Le système de jeu utilisé régulièrement par le staff stéphanois a été maintenu malgré les absences de Gabriel Silva et RPG, blessés - un 4-2-3-1 qui devient 4-4-2 en phase défensive, le "10" (Cabella) et l'avant-centre (Beric au coup d'envoi) formant le premier rideau défensif :


On peut voir sur cette image le positionnement de Diousse en latéral gauche et celui de Hamouma et KMP en milieux excentrés. A la 60e, un double changement a entraîné des permutations dans le bloc stéphanois. Ntep est entré à la place de KMP, qui a reculé en latéral à la place de Diousse, qui est sorti. Bamba est entré à la place de Hamouma, qui est monté en avant-centre à la place de Beric, qui est sorti :


Et à la 85e, le dernier changement des Verts a déclenché une autre permutation, avec Janko qui est entré en latéral gauche à la place de KMP, qui a pris la place sur l'aile droite de Bamba, qui est devenu avant-centre à la place d'Hamouma, sorti :


Même si les joueurs doivent jouer à des postes inhabituels ou en changer plusieurs pendant le match (surtout KMP), le staff stéphanois reste cohérent dans ses choix tactiques et le système de jeu reste toujours le même.

En début de match


Même si le système reste inchangé, l'animation offensive mise en place n'est pas forcément la même que lors des matchs précédents. Pour l'illustrer, deux exemples - lors du premier, en tout début du match, M'Vila joue un coup franc dans la moitié adverse :


Il passe à Cabella, qui joue en retrait avec KTC. Une phase de préparation typique pour l'ASSE commence...


... avec un échange de ballon KTC - Selnaes, puis Cabella est de nouveau servi...


... avant qu'il donne le ballon à M'Vila, qui lui le rend dans le couloir gauche :


Le bloc alsacien est en place, avec deux lignes de 4, un avant-centre entre les deux défenseurs centraux et un milieu offensif (Corgnet) qui essaye de couper les passes entre M'Vila et Selnaes. Les deux milieux axiaux des Verts n'ont pas besoin de combiner, le premier trouve magistralement Hamouma, qui était sorti de "sa place" axiale entre les lignes. Il joue en retrait avec Selnaes...


... et ses coéquipiers font un excellent double-appel. Beric décroche, ce qui fait monter toute la ligne défensive avec lui, pendant que KMP, Cabella et Debuchy font des appels en profondeur - comme ils partent de loin, ils ne sont pas hors-jeu. C'est le dernier qui est à la réception de la magnifique passe lobée de Selnaes...


... et le décalage est énorme dans l'axe. Malheureusement, le latéral stéphanois ne joue pas en première intention, mais il préfère contrôler, ce qui laisse le temps aux défenseurs de revenir et contrer le centre.

C'était une belle action, avec du mouvement, bien préparée, et qui aurait mérité mieux comme conclusion. A partir de ce moment, les Verts ont commencé à rater de plus en plus des passes, de moins préparer leurs attaques et d'abuser des ballons en profondeur. D'ailleurs, entre cet exemple et l'exemple suivant, 74 minutes plus tard, l'ASSE a tiré seulement 3 fois (tête de Selnaes sur corner, centre raté de Ntep - compté comme tir - et un tir de loin du Norvégien). Pendant le même intervalle, Strasbourg a tiré 11 fois (trouvant le cadre et impeccable Ruffier 5 fois), dont 9 fois dans le jeu.

En fin de match


Le deuxième exemple commence comme le premier, avec M'Vila qui joue un coup franc pas loin de la ligne médiane :


Il cherche pendant quelques bonnes secondes un partenaire qui lui propose une solution, en vain. Subotic lui fait signe de jouer long, mais il préfère ne pas se débarrasser du ballon, alors il passe par Ruffier...


... et les Stéphanois font tourner le ballon dans la défense, tranquilles - Strasbourg n'effectuant pas de pressing haut à ce moment du match. KTC, Subotic, M'Vila... le ballon est envoyé au latéral gauche KMP :


Sans phase de préparation, sans appels, il n'y a pas de décalage créé. KMP lance Ntep plus haut dans le couloir gauche et l'ailier doit se débrouiller tout seul. Il choisit de revenir et de centrer...


... mais son centre est facilement dégagé par la défense. Comme Strasbourg défend bas, M'Vila n'a aucun problème à récupérer le ballon :


Il le donne à Selnaes, qui écarte du côté opposé, profitant de la monté de KTC. Les Verts ne se livrent pas :


Subotic, M'Vila et Selnaes restent à trois derrière pour surveiller l'avant-centre adverse. KTC monte avec le ballon et a devant lui les 6 offensifs stéphanois. Il réussi sa passe qui accompagne le très bon appel de Cabella, qui écarte avec Debuchy. Comme ils sont bien enfermés dans le couloir droit...


... le ballon est sorti via Cabella jusqu'à KTC...


... qui joue de nouveau avec Cabella, qui écarte enfin le jeu. Cette phase de possession a le mérite d'avoir attiré les adversaires à droite, même l'avant-centre est autour de Cabella, ce qui laisse du temps à Subotic pour préparer la suite dans le rond central :


Il ne passe pas par M'Vila, mais écarte directement avec KMP, qui joue en première intention avec Ntep et lui propose ensuite une solution dans son dos. Le changement de côté est rapide, le jeu à une touche de balle aussi, mais la défense n'est pas en déséquilibre pour autant :


KMP arrive lancé dans son couloir, Hamouma est seul dans l'axe de la défense, pendant que Debuchy est surveillé par le milieu latéral adverse sur le côté opposé. Et pourtant, quand le centre en retrait part...


... ce milieu n'a pas suivi, l'appel d'Hamouma concentre les deux défenseurs centraux et Debuchy surgit de derrière le latéral pour couper la trajectoire du ballon pile sur le point de penalty. C'est le seul qui a suivi cette action jusqu'au bout, qui y a cru - Bamba et Cabella ne se sont pas du tout projetés, restant loin de la surface, même Selnaes étant plus haut qu'eux.



Conclusions


Pour remettre les choses dans leur contexte, même si on est nombreux à critiquer la prestation des Verts contre Strasbourg, elle a quand-même été d'un niveau largement supérieur à celles proposées en fin d'année 2017. La barre est placée haut après les dernières sorties et probablement on verra de temps en temps des matchs où les Stéphanois seront un peu moins performants que leurs adversaires du jour. C'était un avertissement sans frais, le scénario parfait pour nous montrer que rien n'est acquis, tout en préservant, même améliorant, nos chances de finir européens à la fin de la saison.