lundi 25 mars 2019

Lyon - RCT, 42-33 (Pietersen, Carbonel)

L'avant-match


En n'ayant plus rien à espérer au classement, le RCT entame la série des 7 derniers matchs qui lui restent cette saison sans pression. Comme il y a 4 déplacements sur ces matchs et comme les Toulonnais n'ont gagné que chez les derniers, il ne faut vraiment pas s'attendre à un résultat positif d'un match chez une équipe comme Lyon, qui se bat pour sa place de barragiste...

Le match...


... commence avec des Toulonnais joueurs, qui gardent le ballon (65% de possession), sans pourtant avancer ou franchir. Les Lyonnais sont plus tranchants et se nourrissent de la grande indiscipline dans les rangs du RCT et restent ainsi accrochés au score, malgré le bel essai de Pietersen (voire plus bas). Le LOU passe même devant à la 33e avec une relance de leurs 22m, mais la 1e période se finit à égalité, 16-16.

La 2MT commence en trombe pour les Toulonnais, avec une relance de leur 22m, un superbe franchissement de Carbonel et un essai de pénalité (+ carton jaune à la clé). On peut se dire à ce moment que la voie est ouverte pour une victoire du RCT à l'extérieur, mais c'est sans compter sur la différence de motivation. Pas d'autres points inscrits en supériorité numérique, mais un carton jaune pour Messam met les Toulonnais en infériorité et ils encaissent un essai après une mêlée à 5. Puis un double carton jaune crée des espaces et malgré leur défense héroïque, ils encaissent un autre après une touche à 5 et un maul. Plusieurs pénalités sont sifflées contre le RCT, ce qui permet aux Lyonnais de se détacher au score et mener 32 à 23. Et dans les 10 dernières minutes, le LOU marque un autre essai, auquel Carbonel, très en jambes, répond dans les arrêts du jeu. Trop tard pour ramener un point de bonus défensif, par contre...

L'action


Après 8 minutes de jeu, le RCT bénéficie d'une mêlée sur la ligne médiane, côté gauche :


Après un 89, Webb (9) se libère du demi de mêlée adverse avec une feinte de passe, franchit la ligne et donne le ballon à Tuisova (13), arrivé lancé. Le centre toulonnais entre dans les 40m lyonnais...


... et essaye de passer après contact pour Ollivon (8). Le ballon tombe par terre, mais en arrière, et ramassé par le troisième ligne qui est mis au sol. Isa (7) s'empare pour un nouvel point de fixation dans les 22m adverses...


... et puis un autre, par Gorgodze (4). La défense est fixée et les Toulonnais sont bien présents à l'extérieur. Ainsi, quand Webb (9) sort de nouveau le ballon pour Carbonel (10)...


... un surnombre est créé par l'appel croisé de Pietersen (15). Saivea (12) et Messam (6) passent sur un pas pour fixer les deux derniers défenseurs et lancer Nakosi (14) dans son couloir. Il est malheureusement repris par l'arrière lyonnais et il marche sur la ligne de touche avant d'applatir. Le LOU bénéficie donc d'une touche dans ses 22m :


 Mais le lancer n'est pas droit et le RCT récupère une mêlée...


... très mal défendue par les Lyonnais, qui mettent deux joueurs dans le fermé et 4 côté ouvert. Du côté du RCT il n'y a que Nakosi (14) dans le fermé, et en plus il change de côté ! Webb (9) sort le ballon et lui le donne...


... pendant que la course croisée de Saivea (12) fixe trois défenseurs, laissant un seul contre trois toulonnais :


Nakosi (14) donne à Carbonel, qui passe à Tuisova (13), qui fixe le dernier défenseur avant de lancer Pietersen (15) marquer le premier essai du match.


La suite


Pour la première fois depuis 7 ans, le RCT a une semaine libre au moment des quarts de finale de la Champions Cup. Les joueurs pourront donc regarder à la télé le haut niveau, auquel ils ne sont plus invités - et ils ne le seront pas la saison prochaine non plus. Le Top 14 reprendra dans deux semaines avec la réception de la meilleure équipe du championnat - pour positiver, on peut dire qu'on n'assistera pas à une nouvelle défaite à Mayol, le match étant délocalisé...

jeudi 21 mars 2019

RCT - Montpellier, 18-21 (van der Merwe, Webb)

L'avant-match


La réception de Montpellier est le dernier vrai doublon en période de Tournoi, mais c'est aussi un tournant de la saison pour le RCT. Les deux équipes se trouvent dans le ventre mou, à égalité de points de la zone rouge et des places de barrage - le vainqueur aura le droit d'espérer une fin de saison à enjeux. Et c'est aussi l'occasion des jeunes joueurs toulonnais de confirmer contre une équipe plus forte, après les bonnes prestations contre Pau et Perpignan.

Le match...


... met en évidence dès son début les difficultés des Toulonnais dans les rucks et leur manque d'idées en attaque. Quand en plus ils ratent leur lancers (8e) ou font des en-avants dans les mauls (9e), ça dévient compliqué, mais heureusement la défense tient, même si parfois elle recule à l'impact. Les quelques minutes de rêve après la 20e (voire plus bas) sont vite gâchées par un ballon perdu dans un ruck et un essai encaissé suite au turnover. La 1MT se finit ainsi sur le score de 15 à 7, avec les joueurs du RCT se montrant plus dangereux juste avant de rentrer aux vestiaires.

Où ils y sont probablement restés, parce qu'en 2MT les Toulonnais ne peuvent pas dire avoir fait grande chose, autre que défendre dans leur moitié. Un nouveau ballon perdu au sol permet à Montpellier de marquer un essai dès la 45e, heureusement refusé à la vidéo. Les joueurs du RCT peinent à sortir de leur camp : après une mêlée à 5, puis une autre sur les 22, ils se trouvent à jouer une touche à 5m... et il perdent le ballon au sol - la vidéo accorde celui-ci. Les rares incursions dans le camp adverses sont gâchées par des en-avants, mais les Toulonnais marquent 3 points pour porter le score à 18-14. Et comme Montpellier enchaîne les touches sur les 5m du RCT, Ollivon prend un jaune et le maul qui suit donne le 3e essai adverse. Le score devient 18-21, score final, même si un sursaut d'orgueil permet aux Toulonnais de marquer à la 73e un essai, invalidé par la vidéo.

L'action


On joue depuis 20 minutes et le RCT bénéficie d'une mêlée dans son camp :


Après une très bonne poussée, le pack toulonnais obtient une pénalité. Carbonel trouve une touche à l'entrée des 22m adverses :


Le lancer d'Etrillard (2) est capté par Ollivon (8)...


... qui lui rend le ballon. Le talonneur toulonnais joue avec Webb (9), qui écarte avec Carbonel (10), entouré de trois autres trois-quarts (Nakosi - 14, Tuisova - 13 et Trihn-Duc - 12). Il porte un peu le ballon...


... et joue ensuite à l'extérieur avec Bonneval (15). L'arrière toulonnais joue au pied pour la course d'Ikpefan (11), mais un adversaire s'empare du ballon... en commettant un en-avant. Mêlée toulonnaise dans les 22m montpelliérains...


... et de nouveau une grosse poussée qui donne une pénalité. Touche à 5...


... et maul conquérant, pour le premier essai du RCT, marqué par van der Merwe (3).

La remise en jeu est captée par Isa (7) sur la ligne des 22 :


Webb sort pour Alainu'uese, qui donne à van der Merwe (3) pour un premier point de fixation :


Le ballon est ensuite envoyé au large, avec Webb (9) qui sert Carbonel (10), qui saute Trihn-Duc (12) pour donner à Bonneval (15), qui saute Ollivon (8) pour Ikpefan (11). Il n'y a pas de décalage et l'ailier toulonnais est plaqué, mais il laisse le ballon en arrière, où il est récupéré par Trihn-Duc. Webb (9) le sort...


... avec une longue passe pour Carbonel (10), qui envoye une encore plus longue pour Tuisova (13). Les avants ont été sautés, mais la ligne défensive adverse aussi. Tuisova court vers l'extérieur...


... où son frère l'attend. Il fixe le dernier adversaire dans la ligne, le 13 adverse, et sert Nakosi (14) qui casse le plaquage de l'ailier montpelliérain. L'arrière est en couverture...


... mais il ne peut rien faire contre 5 toulonnais. Nakosi (14) le fixe avant de redonner à Tuisova (13), qui fixe le tout dernier défenseur avant d'envoyer Webb (9) marquer le 2e essai du RCT.

Deux essais marqués coup sur coup, le premier par des avants conquérants (deux pénalités en mêlée, deux lancers réussis et un maul), le deuxième par des trois-quarts efficaces, rapides et précis. Les seules cinq minutes à retenir de ce match, il vaut mieux oublier le reste...

La suite


Le Tournoi est fini, mais les internationaux seront quand-même au repos la semaine prochaine pour le déplacement à Lyon. Sans importance, c'est une fin de saison en roue libre qui attend les Toulonnais, qui n'ont plus aucun espoir de qualification et pas vraiment d'inquiétudes pour la relégation. Il reste 7 matchs, dont 2 réceptions très difficiles (Toulouse, Clermont) et 3 déplacements chez du Top 6 (Lyon, Castres, La Rochelle). Bref, la réception de Bordeaux et le déplacement à Grenoble sont donc les seuls matchs où le RCT peut espérer un résultat positif...

lundi 18 mars 2019

Caen - ASSE, 0-5 (Hamouma, Beric, Nordin, Ghezali, Vada)

Trop simple ?


La plus large victoire des Verts cette saison a été rendue facile par le niveau de leurs adversaires, mais aussi par la qualité du jeu stéphanois.


Même si Caen est désormais lanterne rouge, il n'y a pas tout le monde qui s'impose 5-0 chez eux, il n'y a pas tout le monde qui leur met 3 buts en 30 minutes. Les Stéphanois ont eu un match simple, mais ils ont eu le mérite de savoir se le rendre ainsi. Ils ont su développer leur jeu basé sur une bonne maîtrise technique et des appels sans ballon auxquels les Caennais n'ont pas su répondre. Et c'est encore plus méritoire compte tenu du groupe qui a fait le déplacement : suite aux nombreux blessés et suspendus, l'ASSE a eu sur le banc un seul joueur de camp comptant plus de quelques matchs en pro, Vada. Et donc l'équipe alignée n'a pas été surprenante, ni le système tactique, un 4-2-3-1 qui dévient 4-4-2 (4-4-1-1) en phase défensive :


Cabella retrouve ainsi sa place préférée sur le terrain, en "10" entre les lignes, avec des joueurs de couloir de chaque côté et un avant-centre qui fixe la défense. Un système qui lui convient à merveille, comme on peut le voir dans les exemples suivants, dont le premier commence à la 4e minute :


Ruffier remet le ballon en jeu avec Kolodziejczak. Caen propose un bloc en 4-1-4-1, donc avec une sentinelle qui devrait normalement s'occuper de Cabella. Sauf que ce dernier s'est déplacé partout dans cette zone entre les deux lignes de 4 adverses. Dans cet exemple, il coulisse vers la gauche de l'attaque stéphanoise, tout comme Hamouma (Nordin étant l'ailier droit). Il n'y a pas de pressing sur les défenseurs Verts et Kolo trouve M'Vila :


Les deux lignes caennaise sont éloignées et les Verts y placent 3 joueurs, Cabella, Aït Bennasser et Nordin. La passe de M'Vila casse la première ligne pour trouver le premier d'entre eux, qui s'ouvre l'angle de passe pour lancer Hamouma dans le couloir gauche. Un défenseur éliminé et...


... un gros déséquilibre est créé autour de la surface adverse. Cabella et Beric attendent le ballon, Aït Bennasser et Nordin sont complètement libres - Hamouma choisit de tirer et ouvre ainsi le score. Si on peut imputer le but à la faute de main du goal adverse, il faut quand-même souligner la facilité des Verts pour créer une situation dangereuse en seulement 3 passes. Une pour donner le ballon à M'Vila, une pour casser la première ligne et trouver le meneur de jeu et une dernière pour décaler un offensif.

Et ceci n'a pas été un cas isolé... comme par exemple 2 minutes plus tard, avec le même lancement de jeu :


Quand Kolo reçoit le ballon de Ruffier, M'Vila est dans la ligne des milieux et Cabella à côté de la sentinelle adverse. Les défenseurs stéphanois échangent des passes...


... laissant leurs coéquipiers se positionner comme dans le premier exemple. Et la suite est identique :


Même trio entre les deux lignes, même passe qui casse la première... c'est seulement par la suite que les actions diffèrent, Hamouma repique vers l'axe pour resserrer la défense et c'est Polomat qui est lancé dans le couloir gauche :


Malheureusement, son centre est repoussé en corner par un adversaire. Ces deux actions se ressemblent énormément - les exemples suivants sont légèrement différents, mais basés sur les mêmes principes. Deux minutes plus tard, Nordin, qui avait permuté avec Hamouma, aide M'Vila, Aït Bennasser et Kolo à combiner :


Cabella se trouve de nouveau entre les lignes, toujours loin de la sentinelle, qui est bien dans l'axe, mais loin de tous les Stéphanois qui s'y trouvent...


... dont Nordin, qui reçoit la désormais habituelle passe verticale de M'Vila. Et qui lance son coéquipier dans le couloir gauche, Polomat, dans le dos du latéral adverse. Du coup, ce décalage dans le couloir crée un encore plus gros dans la surface :


La passe en retrait pour Cabella est réussie, son tir est un peu manqué et repoussé jusqu'à Hamouma, complètement libre au deuxième poteau. Son centre-tir est sorti de sous la barre par le goal adverse.

Ce que tous ces exemples ont en commun est une passe de M'Vila qui casse la première ligne. Ceci devient possible à cause des faiblesses dans le bloc adverse : pas de pressing sur lui, des lignes trop distancées, avec une sentinelle qui ne peut pas couvrir tout cet espace et tous les adversaires qui s'y trouvent. Et avec une ligne des milieux qui ne coupe pas les angles de passe... mais il faut souligner les petits appels (les petites flèches) du joueur recherché par M'Vila juste au moment de la passe, quelques mètres pour se décaler pour que la passe ne soit pas interceptée. Et cet aspect est encore plus visible dans l'exemple qui commence à la 19e minute :


Beric intercepte un ballon, un contre démarre, mais est ensuite calmé par Hamouma, qui joue en arrière. Les deux équipes se positionnent et Kolo donne le ballon à M'Vila :


La ligne des milieux caennais n'est plus une ligne, mais Cabella se trouve derrière trois (!) adversaires et ne peut donc pas être trouvé. Il n'y pas d'autre Stéphanois entre les lignes, alors Beric décroche pour proposer une solution, mais M'Vila préfère jouer en latéral. Jusqu'à Saliba et retour...


... ce jeu latéral a comme but d'attendre la faille dans le bloc. Faille qui ne peut être créée que par du jeu sans ballon. Comme celui de Cabella, qui traverse cet espace entre les lignes...


... et qui ouvre donc l'angle de passe pour M'Vila. Cinq milieux éliminés par une passe, le latéral gauche sort sur Cabella, ce qui libère complètement Nordin :


Il a le temps d'ajuster sa passe et il a plusieurs possibilités dans la surface. Mais son premier centre est contré et son deuxième repoussé par un défenseur :


Le ballon est de suite récupéré par Aït Bennasser, qui joue avec ses défenseurs, pour permettre à tout le monde de se replacer. Et quand Subotic le reçoit de nouveau, la même faille est trouvée :


L'angle de passe vers Cabella n'est pas fermé et il est de nouveau complètement libre entre les lignes :


Encore mieux, il n'est pas le seul Stéphanois à faire des appels intelligents. Nordin amène le latéral adverse vers l'axe, pendant que Hamouma, venu du côté opposé, plonge dans son dos, où il est parfaitement trouvé par Cabella. Et Beric est à la réception du centre pour le deuxième but de l'ASSE.


Et comme à la demi-heure de jeu le 6e tir des Verts (5e dans le jeu, aucun pour Caen) porte le score à 3-0, le match est plié. Le reste de la rencontre s'est déroulé de la même manière, avec des Stéphanois qui trouvent des décalages, qui ont parfois du déchet dans le jeu, mais sans être embêtés par des Caennais complètement amorphes. Un scénario idéal donc pour faire entrer des joueurs moins expérimentés, comme Ghezali à la place de Hamouma et Gueye à celle de Beric. Du poste pour poste, pas tout à fait comme pour Vada qui, entré à la place de Nordin, a excentré Cabella à gauche. Un 4-3-3 pour l'ASSE dans le dernier quart d'heure, comme on peut le voir dans cet exemple à la 85e :


Touche de Polomat pour Cabella, qui lui rend le ballon, qui arrive dans les pieds de Vada. Un triangle de passe avec Kolo et M'Vila...


... puis un autre avec Kolo et Polomat...


... avant de le redonner à Kolo. Ce jeu attire les adversaires, qui essayent un pressing timide, ce qui laisse Cabella complètement libre dans le couloir gauche :


Malheureusement, Kolo hésite et se fait reprendre le ballon. Heureusement il revient et regagne la possession, avant de le donner à Vada...


... qui trouve Aït Bennasser plus loin, qui relaye pour Cabella à gauche :


Une sortie de balle finalement réussie et les Verts attaquent à 3 avec Cabella - Gueye - Ghezali. Le premier porte le ballon, repique vers l'axe...


... et trouve l'ailier opposé. La défense ne devrait pas avoir du mal, à 5-contre-3, mais les Caennais n'étaient pas en confiance... et le très jeune ailier marque son premier but en pro, avec la contribution de Gueye, impliqué aussi sur le but suivant, 5 minutes plus tard.




Conclusions


Certes, c'était un adversaire objectivement très faible, qui en plus a fait une mauvaise entame de match, très mauvaise pour la confiance. Donc même si le score est très large, il ne faut pas tomber dans l'excès. Mais on peut quand-même souligner le sérieux des Verts, leur application - mener 3-0 au bout d'une demi-heure n'est pas donné à tout le monde. Et tactiquement, ça a été parfait : les points forts des Stéphanois (qualité de passe de M'Vila, déplacements de Cabella) ont parfaitement exploité les failles du bloc défensif des Caennais (pas de pressing, trop d'espace entre les lignes). Bref, une large victoire méritée, qui représente la meilleure façon de commencer une trêve internationnale et le sprint final qui en suit. Et même si d'autres adversaires seront plus forts, les Verts ont clairement les ingrédients nécessaires à leur disposition pour attendre leur objectif.

lundi 11 mars 2019

ASSE - Lille, 0-1

Maladroits


La troisième défaite à domicile en championnat a mis fin aux rêves de podium pour les Verts et vient conclure toute une série de mauvais résultats contre les gros.

Le derby perdu à la dernière seconde n'a été que le début d'un enchaînement difficile en 2019 : l'ASSE a ensuite perdu tous les matchs contre les gros (Paris, Marseille et maintenant Lille - et on peut même rajouter Rennes, un candidat déclaré à l'Europe). La bonne nouvelle pour les Stéphanois est qu'à partir de maintenant ils rencontreront des équipes moins fortes sur le papier. La mauvaise, elle vient de la qualité du jeu produit.

Si à Marseille l'investissement a été clairement pointé du doigt, contre Lille c'est plutôt la maîtrise. Comme le dit Jean-Louis Gasset en conférence de presse après le match, "on a essayé, maladroitement, surtout techniquement où c’était très moyen". Ce manque de maîtrise technique peut ne pas être rédhibitoire lors des certains matchs, mais il le devient contre une bonne équipe. Surtout quand l'approche tactique s'y base dessus : "On savait que Lille était une équipe très forte, très rapide en contres avec quatre joueurs. Il fallait avoir une maîtrise technique dans la sortie de la balle, surtout au milieu pour arriver à les faire défendre". Et pire encore, quand c'est un mal récurrent depuis plusieurs matchs ("depuis début janvier, on joue beaucoup moins bien. Le jeu n’est pas fluide, on ne fait pas courir l’adversaire").

Bref, le match s'est joué (et a été perdu) au milieu du terrain, par manque de maîtrise technique, mais aussi par des choix tactiques trop risqués. Avant de regarder quelques exemples, les systèmes tactiques en place :


Les absences de KMP, Silva et Perrin ont forcé les Verts à abandonner leur défense à 3 centraux, c'est de nouveau un bloc en 4-4-2 qui est proposé. La (légère) surprise vient du positionnement de Cabella en ailier, laissant Khazri rester en axe, en soutien de Beric. Quand aux Lillois, ils sont aussi dans un 4-2-3-1, avec un milieu offensif très près de l'avant-centre.

Leur bloc défensif, par contre, est conçu pour enfermer les milieux axiaux adverses, comme dans cet exemple à la 3e minute :


On aperçoit très bien un trio Hamouma-Khazri-Beric dans la défense à 4, avec Cabella bien plus excentré à gauche. Le ballon circule dans la défense stéphanoise, pendant que les deux milieux axiaux M'Vila - Aït Bennasser sont entourés de 6 Lillois. Le ballon circule dans l'autre sens, tout le monde coulisse vers la gauche :


Les milieux axiaux ne peuvent pas être trouvés, alors Kolo balance un long ballon en profondeur, qui ne trouve personne.


Pour pouvoir toucher le ballon et organiser le jeu, M'Vila doit sortir de cette zone au milieu, comme dans cet exemple à la 10e minute :


En soit, ce mouvement n'a rien d'extraordinaire pour des Verts évoluant avec une défense à 4 : M'Vila descend à gauche de la charnière centrale et le meneur de jeu descend à sa place. Sur l'image précédente on voit bien le trio Hamouma - Khazri - Cabella sur la même ligne, mais ce n'est pas Khazri qui décroche pour remplacer M'Vila, c'est Cabella, comme à son habitude :


Il reçoit le ballon et combine avec Aït Bennasser...


... mais combiner dans cet espace entre les deux premières lignes du bloc lillois est risqué : l'ailier droit intercepte la passe vers M'Vila. Cette récupération haute est très dangereuse, la défense n'est pas en place :


Heureusement, l'ailier ne combine pas avec son avant-centre, se laissant excentrer par le positionnement de Subotic et son tir dans un angle fermé est repoussé par Ruffier.


A la 17e minute, on aperçoit de nouveau le même mouvement de M'Vila pour pouvoir construire une attaque proprement :


Le ballon circule entre Debuchy, Saliba et Subotic - plusieurs joueurs sont surveillés de près par les Lillois, alors M'Vila descend...


... à la place de Kolo, qui monte dans le couloir gauche, d'où Cabella avait décroché pour prendre la place de M'Vila. Le reste est un positionnement standard, un bloc 4-4-2 pour le LOSC et un 3-4-3 pour les Stéphanois. Malheureusement les 3 offensifs ne proposent aucune solution, et comme la paire dans l'axe n'est pas facile à trouver, Subotic essaye un long ballon...


... à destination de Debuchy, mais trop long. Sur cette image on voit que ce genre d'ouverture  était une bonne solution dans ce contexte (chercher les pistons dans un 3-4-3), mais qu'en même temps les offensifs ne coordonnent pas leurs appels, Hamouma et Khazri se marchant sur les pieds...


Comme les deux équipes évoluent dans des systèmes similaires, il n'est pas surprenant de voir que les milieux axiaux lillois étaient aussi enfermés par 6 stéphanois quand ils essayaient de construire, comme par exemple à la 22e :


Mais il y a une différence importante entre les deux blocs défensifs - dans l'exemple à la 10e minute, les Verts avaient 3 joueurs offensifs surveillés par 4 défenseurs. Dans ce cas, il y a 6 joueurs de chaque équipe autour de la ligne médiane, ce qui signifie que les défenseurs stéphanois se retrouvent en 1-contre-1 avec leurs adversaire respectif. Un risque très important, surtout que les attaquants lillois sont à la fois très techniques et très rapides :


C'est l'ailier gauche qui est recherché par une passe en profondeur et Kolo doit se débrouiller seul, aucun autre défenseur ne peut l'aider sans laisser libre un autre attaquant. Heureusement, la passe n'est pas bien dosée...


Quand l'étau dans l'axe n'était pas en place côté Lillois, les Verts ont pu construire plus tranquillement. A la 34e, Ruffier joue avec Kolo à gauche :


Le bloc du LOSC est dans un vrai (4-)2-3-1, avec le latéral droit qui monte sur Cabella, descendu combiner dans le couloir. Il échange des passes avec Kolo, qui joue avec M'Vila, libre de marquage. Mais pas pour longtemps...


... car le milieu offensif adverse le cherche et sous sa pression, M'Vila recule de plus en plus et finit par perdre le ballon ! Initialement à côté de l'avant-centre, Subotic n'a pas suivi...


... mais Saliba revient en extrémis et empêche l'attaquant lillois de frapper - Ruffier peut s'emparer du ballon. Il relance assez rapidement et Aït Bennasser porte la ballon :


Khazri avait changé de place avec Cabella, qui retrouve une position plus axiale. Le premier reçoit le ballon en position excentrée, le latéral droit monte sur lui, tout en laissant 3 coéquipiers surveiller Hamouma et Beric dans l'axe... mais Debuchy est seul de l'autre côté, où il est parfaitement trouvé par la transversale de Khazri. La défense est obligée de coulisser et le bloc lillois est éclaté :


Cabella est complètement libre en position de "10" et il demande le ballon. Il le reçoit et, face au jeu, il peut servir Beric...


... qui se joue d'un défenseur centrale et tire. La première (et seule !) frappe cadrée stéphanoise est repoussée par la jambe du gardien dans les pieds de Khazri, seul au 2e poteau. Malheureusement, il a du mal à contrôler le ballon, n'arrive pas à tirer, et finalement la plus grosse occasion stéphanoise du match n'est pas convertie...


Comme le bloc adverse était vraiment axial, changer de côté avec des longues transversales était une option pertinente et les Stéphanois ont continué à l'utiliser. Les changements effectués en 2MT ont été tous du poste pour poste, le système 4-2-3-1 a été maintenu, même si de plus en plus souvent Khazri se retrouvait ailier et Cabella en "10". Ce système est bien visible à la 86e, quand Saliba intercepte une passe :


Le ballon arrive dans les pieds de M'Vila, qui joue avec Khazri, ailier droit, qui change de côté vers Nordin, entré en ailier à la place de Hamouma. On peut donc voir le 4-2-3(-1) des Verts, avec 9 joueurs de champ dans leur moitié, contre seulement 6 Lillois, ce qui veut dire que Gueye, l'avant-centre entré à la place de Beric, se trouve seul contre 4 défenseurs dans la moitié adverse. Dans le couloir gauche...


... Nordin combine avec Kolo, qui avait dédoublé et qui joue dans l'axe avec Vada, entré en milieu axial à la place d'Aït Bennasser. Une nouvelle transversale est utilisée...


... pour retrouver Khazri à droite. Les deux lignes de 4 du LOSC se sont reformées et les Verts attaquent en nombre, à 7, laissant seulement Subotic, Saliba et M'Vila derrière. Debuchy dédouble à droite et Khazri en profite pour porter le ballon vers l'axe. Il ne combine pas avec ses coéquipiers dans l'axe...


... mais fait une passe vers personne à gauche. Il est très risqué d'attaquer avec les deux latéraux en même temps, donc Kolo avait décidé de revenir. Mais c'était trop tard, le Lillois envoye le ballon en profondeur dès qu'il le reçoit, et il a raison de le faire :


Kolo et M'Vila étaient trop avancés, Subotic et Saliba défendaient contre deux attaquants sur la ligne médiane. Quand on connaît la vitesse et la technique des adversaires, défendre en égalité numérique est risqué (comme le 4-contre-4 dans un exemple précédent). Mais le faire si haut, à ce moment du match, c'est tout simplement suicidaire. Et ce qui devait arriver, arriva, les Lillois ont converti leur 8e tir cadré du match...



Conclusions


Ce qui a fait la force de l'ASSE en 2018 a plutôt disparu cette année : la forte maîtrise du ballon qui fait courir l'adversaire, les sorties propres, des attaques construites patiemment. Les changements de système et les blessures (les deux étant liés) y sont pour quelque chose, bien entendu. Et parfois la qualité de l'adversaire, qui dans ce cas a parfaitement joué sur ses points forts, fait la différence. Cette série de défaites contre les gros fait mal à la tête, mais surtout à l'orgueil - elle fait comprendre aux Verts quelle est leur place. Mais tout n'est pas perdu, loin de là : l'objectif déclaré du club est de finir européens, et cela reste tout à fait réalisable, à condition que l'envie et la maîtrise soient de retour. Et le match suivant, chez une des plus faibles équipes du championnat, sera révélateur. Une victoire et la confiance sera retrouvée, avec une trêve internationale à disposition ensuite pour reconstruire des automatismes et une qualité de jeu. Un mauvais résultat, et le risque de voir une fin de saison en roue libre, avec un sprint final raté, devient réel.