dimanche 24 février 2019

RCT - Pau, 38-11 (Webb, Isa, Tuisova, Ikpefan, Meric)

L'avant-match


Après le non-match de la semaine dernière, les Toulonnais se doivent de réagir, surtout devant leur public. Malgré les absences des internationaux et encore quelques blessés, le staff du RCT a décidé de trancher dans le vif, écartant quelques joueurs à qui on reproche une faible implication (van der Merwe, Krüger, Saivea...). Mais ce match est important aussi d'un point de vue comptable, les deux équipes étant au même niveau en classement, avec un faible matelas au dessus de la zone rouge...

Le match...


... commence très bien pour le RCT, qui envoie du jeu. Les Toulonnais profitent d'un carton jaune adverse, se font beaucoup de passes et marquent deux essais, par Webb et Isa. Deux joueurs piqués au vif par les déclarations du staff après leurs prestations de la semaine dernière. Malheureusement les hôtes ne gèrent pas très bien les sorties de leur camp après avoir marqué et laisse les Palois revenir dans le match, le score étant de 14-8 après une demi-heure de jeu. Tuisova, très en forme lui aussi, marque le troisième essai toulonnais à la 34e, au large, après une belle action. Et après une pénalité de chaque côté, la 1MT se finit sur un score de 24-11.

La deuxième période ne ressemble pas à la première, ce sont les Palois qui contrôlent le match, qui envoient du jeu, mais sans marquer, la faute d'une très belle défense du RCT. Malheureusement les Toulonnais gâchent leurs munitions en attaque, surtout sur les touches - plusieurs lancers dans les 22m adverses étant perdus. Néanmoins, le bonus offensif est obtenu grâce à une relance de leurs 22m, quand à la 51e Isa arrache le ballon sur un plaquage et le terrain est remonté rapidement avec un beau jeu de passes. Et juste avant la sirène ce bonus est sécurisé avec une autre relance des 22m :

L'action


On joue la fin du match, la victoire du RCT est assurée, le bonus offensif virtuellement acquis. Une jeu au pied palois est récupéré et les Toulonnais relancent de leurs 22m. Isa (7) sort le ballon d'un ruck...


... et comme tout le monde s'attend qu'il le passe à gauche, il tape un coup de pied pour lui même avant de franchir sur 20 mètres ! Tuisova (14) et Ikpefan (11) assurent la sortie du ballon, qui arrive dans les mains de Meric (9) :


Le jeu de passes toulonnais est impressionant. Meric (9) pour Trihn-Duc (12), qui choisit Lakafia (8) au milieu d'un groupe de 3 avants, avec Monribot (6) et Fresia (1). Pas de point de fixation, le capitaine du RCT sert Carbonel (10)...


... qui sert Fekitoa (13), arrivé lancé. Il fixe un des 3 derniers défenseurs et donne après contact à Alainu'uese (4), qui fixe l'avant-dernier défenseur...


... et passe après contact à Devaux (3), qui fixe le dernier défenseur et donne après contact...


... à Carbonel (10). Il aurait pu jouer à droite, avec Gorgodze (5) et Soury (2), mais il a préféré l'intérieur, où le demi d'ouverture est suivi par Monribot (6) et Lakafia (8), mais aussi par Meric (9). Le dernier est servi pour éliminer le palois qui était arrivé en couverture et le 5e essai toulonnais est tout fait.

Huit passes dans un seul temps de jeu, qui commence avec Meric et qui se finit avec lui. Du jeu sur la largeur, des prises d'interval, des passes après contact... du rugby, quoi, on avait oublié à quoi ça ressemble du côté de la Rade.

La suite


Avec cette victoire bonifiée, les Toulonnais se placent parfaitement dans le ventre mou, à égale distance, 13 points, entre la 6e place et le premier relégable. Ils ont montré une belle réaction, mais elle était à domicile - il faudra enfin se montrer en vraie équipe de rugby à l'extérieur. Et la semaine prochaine l'occasion est idéale, un déplacement chez la lanterne rouge. Entre une équipe qui n'a jamais gagné à domicile et une autre qui n'a pris aucun point à l'extérieur, laquelle mettra fin à son record ?

Dijon - ASSE, 0-1 (Subotic)

Courage, Gaby !


Les Verts ont réussi à gagner à l'extérieur (seulement la troisième fois en Ligue 1 cette saison) - une petite victoire, mais importante dans la course à l'Europe.

Malheureusement, la victoire à Dijon a été entachée par la grave blessure de Gabriel Silva, qui sera absent jusqu'à la fin de la saison. Avec celle de KMP la semaine dernière, le 3-4-1-2 stéphanois des deux derniers mois n'a plus sa paire de pistons. Pire, les deux étaient ceux qui pouvaient suppléer Debuchy en latéral droit - si le titulaire continue à ne pas pouvoir enchaîner les rencontres, le staff des Verts aura des sacrés casse-têtes à résoudre. Surtout que Polomat, le piston gauche remplaçant, est sorti à son tour légèrement blessé à la cheville de cette rencontre.

Pour en finir avec le point infirmerie, une déclaration de Gasset au micros télés après la rencontre laisse entrevoir un changement tactique pour les matchs à venir. Comme Subotic était encore malade, avec de la fièvre - il avait manqué le précédent match suite à un virus - il dit avoir préféré sécuriser la défense en les faisant jouer à 3 derrière. Ce qui laisse donc penser que sans KMP la défense à 5 aurait été abandonnée, et qu'on se dirige donc vers un retour d'une défense à 4 pour les matchs à venir.

Par contre, pour ce match, c'était bien le 3-4-1-2 habituel, dans lequel les Verts ont été dominateurs, mais tranquillement, sans forcer. Une large possession, des situations intéressantes de temps en temps, faisant courir l'adversaire en attendant que ça sourit. Mine de rien, ils ont tiré 16 fois au but et ils ont eu quelques occasions intéressantes. Les exemples suivants illustrent différents aspects du jeu stéphanois : construire les attaques, défendre et procéder en contre sur les phases de transitions. Avec un léger focus sur un élément (pas très) important dans leurs offensives.


Première période


On joue la 17e et les défenseurs de l'ASSE construisent patiemment une attaque en se passant le ballon :


Aït Bennasser et M'Vila sont près de la défense, pendant que Cabella se trouve très haut, excentré à droite. Il décroche et reçoit le ballon du premier milieu axial...


... avant de remonter un peu le terrain et de lancer le piston droit stéphanois, Gabriel Silva. Les Verts attaquent à 4 (Silva - Polomat dans les couloirs, Khazri - Diony dans l'axe) contre un bloc sur deux lignes de 4. Même si la passe de Cabella permet de passer la première ligne, il y a une trop faible présence dans la surface pour que le centre du latéral brésilien puisse être repris. Néanmoins, les Dijonais ont du mal à se dégager - ils y parvient, mais seulement pour perdre la possession immédiatement. Le ballon arrive de nouveau dans la défense stéphanoise :


Cabella est toujours placé à côté de Silva - il est trouvé par la passe de Subotic, mais préfère jouer en arrière, avec Perrin. Subotic reçoit de nouveau le ballon...


... qui arrive de nouveau à Cabella, via Aït Bennasser, et de nouveau une passe en arrière vers le défenseur serbe. Qui décide maintenant de jouer latéralement vers Kolo, qui monte un peu avec le ballon...


... avant d'essayer une passe en profondeur, n'ayant pas d'autres solutions. Ses deux milieux axiaux sont en latéral, Cabella au côté opposé, Khazri et Diony n'ont pas décroché, la seule possibilité aurait été Polomat, mais il était marqué de près. Le ballon est facilement intercepté par un défenseur.


Un quart d'heure plus tard, c'est au tour des Dijonnais de construire une attaque, pendant laquelle il faut surveiller le positionnement respectif des milieux des deux équipes :


Le duo Aït Bennasser - M'Vila est bien en place, tout comme la paire Cabella - Khazri qui empêche les passes vers les deux milieux défensifs adverses. Le ballon est envoyé vers le latéral gauche, donc Silva monte le chercher. Le défenseur de Dijon change de côté...


... et la paire Cabella - Khazri empêche toujours le jeu dans l'axe. C'est autour de Polomat de sortir sur le latéral adverse...


... qui combine avec un milieu, qui n'avait pas du tout été suivi par Khazri. M'Vila est donc obligé de sortir, pendant que l'ailier droit adverse fait un appel dans le dos de Polomat. Kolo doit sortir à son tour...


... et le milieu dijonnais joue parfaitement le coup, faisant à chaque fois des appels dans les espaces libérés par un Stéphanois. C'est donc Aït Bennasser qui est aspiré...


... et le milieu offensif adverse est donc complètement libre dans l'axe, surtout que Silva et Perrin ont deux attaquants à surveiller et ne peuvent pas sortir. Son tir de loin est cadré - leur seul de la première période - mais sans problèmes pour Ruffier.


Même pas deux minutes plus tard, le goal dijonnais cherche son avant-centre avec un long dégagement :


Le ballon est dévié vers le meneur de jeu, qui repique dans l'axe. Il est suivi par Gabriel Silva et Cabella se replie aussi. Entre les deux, il perd le contrôle...


... et les Stéphanois récupèrent la possession, avec M'Vila. Une passe verticale trouve Khazri et les Verts essayent de se montrer dangereux sur cette phase de transition.


Cabella se projette vite dans le couloir droit, il reçoit le ballon, mais préfère temporiser - avec Khazri et Diony ils étaient 3 contre 7 adversaires. Il joue donc en retrait pour Aït Bennasser...


... qui lance parfaitement Gabriel Silva à droite. Non seulement plusieurs adversaires ont été éliminés par la passe et le latéral brésilien est bien décalé dans son couloir, mais en plus le rapport de forces est plus équilibré dans l'axe, avec Khazri et Diony contre trois défenseurs :


Le premier fait un appel au premier poteau, Cabella et M'Vila sprintent pour proposer des solutions aussi, mais Diony ne bouge pas :


Le centre de Gaby cherche donc M'Vila, qui contrôle et enroule une frappe - elle partait bien, mais elle a est repoussée en corner par un défenseur.


Deuxième période


Si l'exemple précédent met en évidence une non participation de Diony au jeu stéphanois, ce n'est malheureusement pas une exception, comme le montre une statistique toute simple : le nombre des ballons touchés - 15 en première période, 6 en deuxième avant de sortir. Pour mettre les choses en perspective, en 1MT tous les autres joueurs de champ en ont touché au moins le double - même Ruffier, pourtant pas sollicité, en a touché plus que lui. Khazri, l'autre avant-centre, a touché le double des ballons de Diony en 1MT et le triple en 2MT avant la sortie de l'ancien Dijonnais. Pourtant, on ne peut pas dire que sa contribution offensive a été complètement nulle, comme le montre cet exemple qui commence tout de suite après la triste sortie de Gabriel Silva :


L'attaque est construite patiemment par la défense des Verts et le ballon est envoyé à gauche, où Polomat le relaye jusqu'à Cabella. Dos au but, celui-ci préfère jouer en arrière avec M'Vila...


... qui trouve de nouveau Polomat, avec un passe qui élimine la ligne des milieux adverses. Le latéral gauche et Cabella échangent quelques passes sans combiner avec Diony, à proximité :


Ce jeu attire un bon nombre de défenseurs adverses, l'idée est donc de changer de côté. C'est fait en jouant en arrière avec M'Vila...


... qui écarte avec Perrin. Le capitaine stéphanois voit l'appel de Khazri et lui donne le ballon :


Le contrôle orienté de l'avant-centre élimine deux adversaires et lui permet de se tourner face au jeu. Nordin, le nouveau latéral des Verts, fait un appel à droite mais il n'est pas servi. Diony, auparavant excentré, fait un appel vers l'axe, sans être servi non plus. Mais son appel resserre la défense et un beau décalage est créé à gauche, où Khazri envoie le ballon :


Le 2-contre-1 est très bien joué par Polomat, qui lance Cabella dans la surface - son tir cadré est repoussé par le gardien. Dans la surface, on peut voir Nordin, suivi par un défenseur, et Diony, entouré par trois ! Même s'il ne participe pas activement au jeu, sa présence et ses déplacements peuvent être utiles, en monopolisant des défenseurs. Après, il peut y avoir débat : si on utilise un avant-centre qui ne construit pas, qui sert seulement à fixer la défense et qui doit se contenter de très peu de ballons, est-ce qu'il n'y en a pas en autre plus efficace dans l'effectif ?



Sinon, pour revenir au déroulement du match, l'ASSE a évolué dans le dernier quart d'heure dans un système plus classique, en 4-2-3-1 :


Saliba est entré en latéral droit, Nordin est monté en ailier et Abi est entré à l'aile gauche - les trois remplaçants stéphanois étaient très jeunes et, avec cette série de blessures, ça deviendra une habitude lors des prochains matchs. Sur l'image ci-dessus, prise à la 80e avant une frappe de Nordin au dessus de la transversale, on peut aussi voir une différence importante entre les deux équipes. Les Verts ont 4 défenseurs qui ne montent pas, ils attaquent seulement avec 4 joueurs, mais gardent la paire M'Vila - Aït Bennasser en contrôle du milieu. Par contre, les Dijonnais sont complètement coupés en deux, entre les 4 attaquants qui ne descendent pas et les 6 défenseurs.



Conclusions


Qu'est-ce qu'on peut donc retenir de ce match ? Comme la semaine dernière, une grave blessure. Et il faudra que cette habitude cesse, sinon dans quelques matchs l'ASSE devra aligner les U19. Déjà, à Dijon les trois entrants étaient jeunes et le seul joueur de champ expérimenté sur le banc était Beric. D'ailleurs, sa non-titularisation peut être vue comme une surprise. C'était un match dominé par les Verts, où l'avant-centre titulaire a fait un match "à la Beric" : invisible dans le jeu, très peu de ballons joués, en se contentant de fixer la défense - avec la partie "se procurer une seule occasion, mais la mettre au fond" en moins. Bref, les remplaçants étaient jeunes et ils ont fait ce qu'ils ont pu, certains plus à l'aise que d'autres. Mais peu importe, à la fin c'est les trois points qui comptent, les Stéphanois ont gagné - une victoire méritée, obtenue sans forcer. Il faudra par contre élever leur niveau de jeu lors des deux prochains matchs, contre deux concurrents directs, s'ils veulent viser plus haut que la cinquième place.

jeudi 21 février 2019

Agen - RCT, 19-10 (Trihn-Duc)

L'avant-match


Après une longue coupure pour permettre au XV de France de se ridiculiser dans le Tournoi, le Top 14 reprend avec un déplacement chaud pour le RCT, sur les terrains d'Agen, concurrent direct dans la lutte pour le maintien. Après avoir gagné pour la première fois de la saison à l'extérieur (à Newcastle) et avoir remporté sur le fil la rencontre avec le Stade Français, les Toulonnais espèrent maintenant ramener des points d'un déplacement en championnat. Et ils ont raison d'y croire après plusieurs semaines de repos et d'entraînement. Certes, des internationaux manquent (Guirado et Bastareaud), mais d'autres sont présents (Belleau et Carbonel). Des joueurs sont toujours blessés, mais peu de titulaires (Fekitoa et éventuellement Pietersen et Nakosi). Bref, ça sera un match disputé.

Le match...


... quel match? Les Toulonnais n'ont pas eu envie d'en disputer, surtout en 1MT. Ils n'ont fait que défendre, et mal en plus - plus de 20% de plaquages ratés dans le premier quart d'heure, ils ont reculé à chaque impact, ils sont rarement allés dans la moitié adverse. Menés 8-0 après 20 minutes, ils ont marqué 3 point sur une pénalité, mais ont encaissé un autre essai à la demi-heure de jeu, suite à une action qui résume toute la prestation des joueurs qui porte le maillot du RCT (voire plus bas).

La 2MT a été différente en terme d'engagement, les Toulonnais ont montré beaucoup plus d'intentions et de volonté. Ce qui nous a permis de voir qu'il leur manque autre chose : un style de jeu et de la maîtrise. Des nombreuses actions prometteuses ont fini par des en-avants (46e, 50e), des ballons perdus au sol (59e, 61e, 65e) ou des lancers en touche volés (58e). Menés 19-3 à 10 minutes de la fin, ils ont eu un sursaut d'orgueil pour marqué un essai par Trihn-Duc, mais pas un deuxième pour obtenir au moins un point de bonus de ce déplacement.

L'action


On joue la 34e minute et après une touche directe d'Agen, le RCT bénéficie d'un lancer à l'entrée des 22m adverses :


Les trois-quarts sont en place, l'alignement est complet. Le lancer de Soury (2) est dévie par Krüger (6) et capté finalement par Alainu'uese (4), mis au sol. Webb (9) sort pour Fresia (1)...


... qui donne à son capitaine Lakafia (8) pour un premier point de fixation. Un deuxième sera réalisé par Soury (2)...


... bien aidé par van der Merwe (3) et Krüger (6). Les trois-quarts sont en place sur la largeur, Belleau (10) derrière le groupe d'avants, la paire de centres Trihn-Duc (12) et Tuisova (13) et dans le couloir Domvo (15) et Ikpefan (11). Après ce nouveau point de fixation, ils sont servis :


Il n'y a pas de surnombre et de toute façon Tuisova (13) n'a fait qu'une chose à chaque fois qu'il a eu le ballon : aller tout droit. Mais non seulement il n'a pas cassé la ligne, il a été repoussé. Pire, il n'y avait aucun avant toulonnais dans cette zone et le contre-ruck adverse a été très bon. Turnover :


Le ballon est vite envoyé au large, surtout que s'il n'y avait pas d'avants à gauche, il y a en plein à droite :


Soury (2) et Lakafia (8) sont un peu courts, pendant qu'Alainu'uese (4) et Isa (7) doivent coulisser pour défendre en infériorité numérique contre des trois-quarts. L'arrière agenais en profite et passe dans le dos du 2e ligne. Belleau (10) arrive en couverture pour lui couper la course...


... et il est donc obligé de taper au pied. Le couloir était défendu par Saivea (14), qui n'avait pas monté pour compléter la ligne, mais qui a 6 mètres d'avance par rapport à l'ailier adverse. Il perd quand-même la course et Agen marque son deuxième essai...


La suite


Nouvelle défaite à zéro points à l'extérieur, le RCT est en route vers un record cette saison. Pire, elle est chez un concurrent direct et la bataille pour éviter la relégation s'annonce âpre. Pire encore, ce sont des ingrédients de base qui ont manqué : aucune combativité, aucune envie... et quand il y a eu un peu, on a pu voir qu'il n'y avait aucun plan de jeu, aucune idée de quoi faire avec le ballon. Bref, c'était un non-match de la part des Toulonnais, pas le premier cette saison. Peut-être une réaction la semaine prochaine à Mayol contre Pau effacera un peu cette image, mais c'est difficile à croire...

mardi 19 février 2019

ASSE - PSG, 0-1

Allez, allez, oh, oh !


Lors de la dernière journée, l'ASSE a perdu le match contre Paris - sans que ça soit une surprise, mais a surtout perdu jusqu'à la fin de la saison son couteau suisse, Kevin Monnet-Paquet.

Ailier avec des faibles statistiques, mais défenseur latéral infatigable et même milieu axial discipliné tactiquement, KMP a bien aidé l'équipe, surtout lors des deux derniers mois quand il a enchaîné les titularisations. C'est maintenant au tour du groupe de lui rendre la pareille et d'obtenir une qualification européenne, afin de lui offrir un retour lors des matchs de poule en septembre prochain. Et dans cette course pour une place en Coupe d'Europe, la défaite contre Paris n'est pas si importante, faisant presque partie de la feuille de route, tellement la différence entre les deux équipes est importante.

Et même si tout le monde s'attendait à une défaite, staff et joueurs compris, elle n'a pas été si nette qu'on aurait pu craindre. Les Stéphanois ont abordé le match comme une petite équipe qui s'intéresse d'abord à comment empêcher son adversaire à se créer des occasions. Et s'ils ont finalement craqué sur un geste technique d'un des meilleurs joueurs au monde, ils n'ont pas vraiment à rugir, ayant fait ce qu'ils pouvaient. Dans les mots du capitaine Perrin : "On a fait le match qu’il fallait. On a eu les situations, ils n’en ont pas eu énormément mais ils ont su faire la différence sur un but un peu venu d’ailleurs. Tactiquement, on a été pas mal". Regardons donc de plus près, à travers quelques exemples, la tactique stéphanoise qui a failli marcher, mais aussi la supériorité parisienne.

Opposition tactique


Les deux équipes ont démarré le match avec des défenses à 3, au 3-4-1-2 désormais habituel du côté de l'ASSE, le PSG ayant répondu avec un 3-5-2. Les systèmes étant symétriques et se neutralisant, la différence est faite par l'animation et l'approche tactique. Par exemple, une équipe peut choisir d'agglomérer un couloir et de construire ses attaques à partir de là, pendant qu'une autre peut décider de subir et jouer vite les contres. Comme dans cette action qui commence à la 19e avec une relance de Ruffier pour Debuchy :


Le trio offensif des Verts, Cabella-Khazri-Hamouma est bien visible, tout comme le positionnement haut des deux pistons, Gabriel Silva et KMP. Debuchy fait une passe lobée et Hamouma contrôle le ballon, se tourne...


... et joue avec KMP, plus haut dans le même couloir droit. A son tour, Khazri décroche un peu pour offrir une solution de passe à son coéquipier...


... et sert ensuite Cabella, qui lance en première intention Hamouma en profondeur, l'attaquant stéphanois ayant démarré sa course dès qu'il avait donné le ballon à KMP. Un beau jeu collectif dans ce couloir droit, mais qui a l'inconvénient d'avoir utilisé tous les éléments offensifs de l'ASSE :


Même s'ils sont en train de sprinter, Gabriel Silva et Cabella viennent de loin, Hamouma ne peut pas center en première intention. Le défenseur repousse un peu le ballon, mais il est regagné par l'attaquant stéphanois...


... qui joue en arrière avec KMP, qui joue encore plus loin avec Debuchy, malgré la présence dans l'axe de la paire Aït Bennasser - M'Vila. Le jeu est calmé, une nouvelle attaque se prépare...


... dans le même couloir ! Sans adversaire devant lui, Debuchy monte balle au pied. Il trouve KMP un peu plus haut, qui donne à Hamouma...


... qui lance au long de la ligne de touche Debuchy, qui avait suivi. Du jeu à trois dans une petit périmètre, réussi, qui permet au défenseur axial droit de l'ASSE de se trouver en position de centre :


KMP avait suivi, Khazri se trouvait déjà dans la surface. Hamouma et Cabella viennent de loin, tout comme Silva à l'opposé. Le centre de Debuchy est repoussé par un défenseur...


... jusqu'au latéral dans ce couloir, qui lance de suite plus haut un des deux attaquants parisiens. Le contre est démarré et il est dangereux, pas moins de 7 joueurs de champs stéphanois se trouvant dans les 30 derniers mètres. Aït Bennasser compensait la montée de Debuchy et les Verts proposent une défense à trois...


... mais le jeu est rapide. La passe en profondeur est déviée par Kolo dans les pieds de l'attaquant  (hors jeu au moment de la passe, mais pas signalé) - Ruffier repousse le tir en corner. Cet exemple a été plutôt l'exception à la règle, ce n'est pas le PSG qui a procédé en contre la plupart du temps. La possession a été parisienne (63% jusqu'au but inscrit) et ce sont les Verts qui ont eu comme plan de jeu de bien défendre et éventuellement se projeter vite dès qu'ils récupéraient le ballon.


En ce qui concerne la manière de défendre, un exemple commence à la 33e avec une longue possession parisienne sur la ligne médiane :


La défense à 5 de l'ASSE est en place, tout comme le milieu du terrain, constitué de Aït Bennasser et M'Vila, mais aussi de Cabella et Hamouma, assez axiaux. Leur but est d'enfermer, de contenir dans l'axe les milieux adverses, pendant que Khazri effectue tout seul un pressing sur les défenseurs. La possession continue...


... et on aperçoit une équipe du PSG coupée en deux. Quatre font un toro avec Khazri dans le rond central, cinq sont pris par les cinq défenseurs de l'ASSE et celui qui devrait relayer le ballon entre eux est pris entre les milieux stéphanois. Les défenseurs parisiens décident d'amener du surnombre en montant plus haut :


C'est toujours compliqué de jouer dans l'axe, alors c'est le piston gauche qui est recherché, mais sous la pression de KMP, il est obligé de jouer en retrait. Et le jeu sur la ligne médiane recommence :



Un tout petit décalage est enfin créé au centre, où un attaquant ayant décroché aspire avec lui Aït Bennasser quand il revient vers la défense. Un milieu central peut être ainsi trouvé par le latéral, mais il n'a pas de solution de passe et se retourne en cherchant une option. Et il finit par trouver...


... un angle de passe improbable, qui traverse tout le monde et lance le piston gauche dans le dos de KMP. La passe en retrait du parisien est reprise par ce même milieu axial qui l'avait lancé, heureusement à côté du cadre.

Le choix stéphanois a clairement été de défendre bas, avec un bloc très compact, dense dans l'axe. Même si un 0-0 aurait satisfait les Verts, ils ont aussi envisagé de se montrer dangereux en contre, comme dans cet exemple qui commence à la 61e avec une attaque parisienne :


Rien n'a changé par rapport aux exemple précédents, le bloc stéphanois est toujours bas et compact, sinon que les 4 milieux sont plus étalés sur la largeur, la faute des milieux adverses, moins axiaux. C'est d'ailleurs un d'entre eux qui reçoit le ballon dans le couloir gauche, mais quand il cherche une passe vers l'axe...


... elle est interceptée par Aït Bennasser, qui monte vite balle au pied pour déclencher un contre. Il y a des appels devant lui :


Les trois offensifs Cabella, Khazri et Hamouma sont disposés sur toute la largeur, mais les trois défenseurs du PSG sont bien en place aussi. C'est le premier qui est recherché par la passe, mais le défenseur s'interpose...


... et cherche de suite un de ses attaquants, avec un long ballon. Les défenseurs de l'ASSE sont bien en place aussi, Debuchy est sur la trajectoire du ballon et lance KMP dans le couloir droit - le contre peut de nouveau démarrer :


KMP s'appuie sur Khazri, qui revient un peu en arrière, avant de décaler Aït Bennasser, qui passe à M'Vila. Le jeu est latéral, mais c'est bien fait, ça permet à Cabella et Hamouma de bien se placer, très excentrés, loin des deux seuls défenseurs adverses. Et M'Vila les a bien vu, sa longue transversale arrive pile dans les pieds de Hamouma :


Malheureusement, les Verts attaquent en infériorité numérique : Hamouma est suivi par 3 défenseurs et ses seuls soutiens son Cabella à l'autre bout du terrain et Silva, Khazri et KMP sur la ligne médiane. Il est donc obligé de temporiser, ce qui laisse le temps à la défense de se remettre en place :


Il sert Khazri en retrait, qui profite des appels de KMP et Cabella pour se mettre en position de tir - sa frappe est contrée, mais le ballon lui revient...


... et il décale Hamouma à droite. La défense parisienne à 5 est bien en place, 2 milieux sont revenus aussi. Les Stéphanois sont bien présents, mais ce n'est plus une situation de contre. Néanmoins, l'appel de Gabriel Silva venant du côté opposé est bien vu par Hamouma, pour une des rares occasions des Verts.



Nous avons pu voir sur ces trois exemples précédents des attaques placées et des contres des deux équipes. Et il y a clairement une différence nette, les Parisiens ont réussi plus souvent ce qu'ils ont essayé de faire. Mais l'exemple le plus illustratif des différences entre les deux équipes intervient à la 54e minute, avec l'ASSE qui bénéficie d'un coup franc :


Bloc parisien en 5-3-2, avec une défense à 5 haute (même si un défenseur n'est pas bien aligné). Quant aux Stéphanois, ils sont en place, avec Cabella excentré à gauche. Khazri démarre une course et Perrin voit cet appel, alors il joue le coup franc, dans le dos de la défense, sans réussite :


Le ballon est facilement repoussé par le défenseur et récupéré par un coéquipier. Hamouma et Cabella, les autres éléments offensifs, sont trop loin pour aider. Le milieu axial du PSG se retourne et...


... envoye un long ballon en profondeur. Perrin est dépassé, un attaquant adverse contrôle et décale un autre, pendant que le milieu offensif vient les aider. Il est servi dans la surface...


... après que les deux attaquants aient combiné pour contourné les 3 défenseurs stéphanois, très mal positionnés. Heureusement, Ruffier sent le coup et sort vite pour fermer l'angle de tir, repoussant ainsi la frappe du Parisien.

Deux longs ballons en profondeur, coup sur coup - une équipe a du mal, offensivement et défensivement, pendant que tout simple simple quand il s'agit de l'autre...


Les 20 minutes après le but


Cette différence de niveau entre les deux équipes est normale, c'est donc encore plus surprenant de voir la réaction du PSG après l'ouverture du score. Mais avant cela, il y a eu quelques changements tactiques lors de cette vingtaine de minutes qui restaient à jouer, illustrés avec trois images :


Avec l'entrée de Beric à la place de Hamouma, le 5-2-3 stéphanois a été maintenu, mais c'est Khazri qui s'est décalé à droite, laissant la place au Slovène dans l'axe de l'attaque. Sur cette image il est assez bas, pour compenser la montée du latéral gauche parisien.

Par contre, le 2e changement des Verts n'a pas été du poste pour poste, Debuchy est sorti pour laisser sa place à Diony et l'ASSE a évolué avec une défense à 4 :


Triangle M'Vila-Aït Bennasser-Cabella au milieu (pointe basse sur cette image, plutôt pointe haute en réalité), trio offensif Diony-Beric-Khazri. A noter, par contre, que le PSG est aussi passé à une défense à 4, dans un 4-1-4-1 plus sécurisant défensivement.

Et finalement, après la triste blessure de KMP, le 3e changement stéphanois a vu entrer Nordin avec un nouveau réajustement tactique :


Un passage en 4-2-3-1 avec Aït Bennasser latéral droit, un duo M'Vila-Cabella au milieu, Khazri en "10"derrière une ligne d'attaque Diony-Beric-Nordin.


Par contre, si on se concentre sur la prestation parisienne lors de ces 20 minutes après le but, elle est surprenante. De 63% de possession avant le but, à seulement 34% après. Aucun ballon touché dans la surface stéphanoise en 20 minutes. Plusieurs cartons jaunes pour avoir joué la montre, pour le gardien et un attaquant. Passage dans un système défensif (4-1-4-1) et surtout sortie d'un attaquant, remplacé avec un défenseur (l'opposé de l'ASSE avec Diony à la place de Debuchy). Bref, des Parisiens qui ont joué petit bras, voulant à tout pris conserver leur faible avance, sans essayer d'aggraver le score.


Conclusions


Certes, l'ASSE a abordé ce match comme une équipe inférieure à son adversaire et il est clair que le match nul aurait satisfait les joueurs et le staff. Quand on voit comme c'était difficile pour les Verts de se montrer dangereux, en contre ou lors des rares attaques placées, on peut comprendre le choix. Surtout que tout semblait plus simple pour les Parisiens, même si leur réaction après le but fait penser que ce n'était pas si simple après tout. Bref, c'est une défaite de plus pour les Stéphanois, mais une défaite "programmée", qui ne devra pas avoir d'incidence sur la feuille de route pour une qualification européenne, objectif déclaré du club. Si la solidarité et les efforts consentis par les joueurs font plaisir à voir et laissent place à de l'optimisme pour la suite de la saison, le gros point noir reste évidemment la grave blessure de KMP. Pour positiver, on peut espérer que le staff et les joueurs s'en serviront comme motivation supplémentaire : il ne faudra pas l'oublier, l'Europe est à chercher, pour le retour de Monnet-Paquet.