dimanche 31 juillet 2022

Dijon - ASSE, 2-1 (Aiki)

La dure réalité


Les Verts ont commencé la nouvelle saison en découvrant que ce qu'ils proposent n'est pas encore suffisant pour bien figurer en Ligue 2

En conférence de presse après le déplacement à Dijon, Laurent Batlles a été très clair : "Quand vous rentrez dans un match de Ligue 2 avec l’état d’esprit montré en première période, vous ne pouvez rien avoir (...) On a montré des choses intéressantes mais vous vous doutez bien que ce n’est pas suffisant"

Ses protégés ont démarré la rencontre dans un système légèrement différent de celui utilisé pendant la préparation, avec deux avant-centres (Bouanga et Krasso) et sans un vrai "10" :


Une défense à 3 Briançon - Giraudon - Nadé, un sentinelle (Camara), deux milieux relayeurs (Zaydou et Lobry) et deux pistons, Maçon à droite et Cafaro à gauche. 


Comme expliqué avant le début de la saison, réussir une animation offensive dans ce système passe par des milieux qui s'excentrent pour apporter du surnombre sur les côtés, mais aussi qui se projettent pour apporter des solutions dans la surface. Voici un des rares exemples réussis en 1MT :


Sur cette attaque stéphanoise qui démarre, on voit bien les trois défenseurs, la sentinelle devant eux, les pistons très hauts, tout comme la paire des attaquants, dont Krasso est plus en retrait que Bouanga. D'ailleurs, pendant la première période, c'est plutôt le dernier qui a fixé la défense pendant que l'autre descendait pour participer plus au jeu. Les Verts combinent en défense et Nadé trouve Lobry, qui s'excentre jusqu'à la ligne de touche.


Ce mouvement apport du surnombre sur ce côté, Cafaro mange la craie aussi, ce qui oblige le latéral droit adverse d'y aller. Et Krasso fait l'appel parfait entre les défenseurs, où il est trouvé par la belle passe de son milieu... 


... et où il crochète pour éliminer complètement l'adversaire qui l'avait suivi. Il centre en retrait, dans la course de Zaydou, qui s'était projeté, mais la frappe de ce dernier est contré. C'était la plus grosse occasion  des Verts.


La sentinelle


Un autre élément clé dans ce système est le jeu de la sentinelle. Car les 3 défenseurs sont souvent laissés seuls (les pistons sont censés être très offensifs) et quelqu'un doit colmater les brèches. En 1MT ce rôles est revenu à Camara, ce qui n'a pas été du tout une réussite. Par exemple, à la 29e minute :


Les Verts sont positionnés pas très haut sur le terrain, on voit le (x)-4-2 sur cette capture d'écran. Ce qui n'est pas visible est que derrière ce n'est pas une ligne de 4, qui couvre toute la largeur, mais un 3+1. Et quand les Dijonnais écartent le jeu à gauche...


... on observe les 3 défenseurs stéphanois étirés par 4 attaquants. Camara, en bonne sentinelle, court pour aider dans l'axe, où Giraudon est seul contre deux. Par contre, Maçon ne suit pas réellement son adversaire, le latéral gauche.


Briançon se trouve aussi seul contre deux, Camara y va pour l'aider, mais ce latéral est servi - on voit sur cette image que Maçon s'était arrêté, décidant que ça vaut pas la peine courir jusqu'au bout. Ce qui a inspiré son ancien capitaine...


... car Camara s'arrête aussi, se contentant de trottiner et lever les bras une fois que Nadé, hésitant seul entre plusieurs adversaires, ne dégage pas le ballon et les Dijonnais en profitent.


Il y avait clairement plusieurs choses qui ne fonctionnaient pas bien dans ce 11 de départ, alors le staff stéphanois a procédé à deux changements à la pause. Maçon a été remplacé au poste de piston droit par Aiki et Zaydou par Louis Mouton :


Ce dernier a pris le rôle de sentinelle et Camara est monté d'un cran. De plus, Bouanga et Cafaro ont changé, le premier passant piston gauche, où il a été beaucoup plus actif et dangereux. Les Verts sont donc passés dans un vrai 3-1-4-1-1, système maintenu jusqu'à la fin du match, les autres changements étant du poste pour poste, les deux dernières recrues n'ayant pas 90 minutes dans les jambes : Rivera a remplacé Lobry et Aouchiche Cafara.

Pour revenir au rôle de sentinelle, voici un exemple de comment Louis Mouton s'en est sorti, à la 75e minute, quand un long ballon dijonnais arrive à Briançon :


Le capitaine stéphanois ne maîtrise pas bien le ballon et il est récupéré par un adversaire, qui le joue directement dans son dos. Giraudon est en couverture, comme pendant tout le match, mais deux défenseurs sont attirés sur ce côté et les Dijonnais se projettent en nombre :


Un d'entre eux fait un appel dans l'espace créé entre les défenseurs, Nadé se retrouve à défendre contre deux, pendant que Mouton est quelques mètres en retard... 

... mais il ne renonce pas, continue sa course, et intercepte cette dernière passe, qui aurait pu être décisive. Bref, une sentinelle qui colmate les brèches et un joueur qui court pour aider ses coéquipiers.



Conclusions


Même si les solutions dans le groupe n'étaient pas nombreuses, on peut dire que le staff stéphanois s'est un peu trompé dans le choix du 11 de départ, mettant quelques joueurs à des postes qui ne leur conviennent pas trop (Camara en sentinelle, Bouanga en avant-centre). Mais aussi en faisant appel à certains qui ne semblent pas trop concernés par ce maillot vert. La première période a été indigne, mais ce n'est que le début du championnat et elle peut servir comme leçon sur le niveau et les ingrédients nécessaires en Ligue 2. Avec l'apprentissage à venir et le temps nécessaire pour construire quelque chose de cohérent, on peut s'attendre à d'autres matchs difficiles pour les Verts...

vendredi 15 juillet 2022

Match amicaux 2022-23

Comment regarder les matchs des Verts

Les protégés de Laurent Batlles sont sur le point de démarrer leur nouvelle saison, en Ligue 2, dans un système tactique peu habituel, qui nécessite quelques explications.

Comme il y a deux ans avec Troyes en deuxième division, l'entraîneur stéphanois semble vouloir utiliser un système tactique qu'on peut décrire comme 3-5-1-1, ou même 3-1-4-1-1 si on veut être plus précis :

Une défense à 3. Deux pistons, les seuls joueurs de couloir. Un milieu à 4 disposé en losange, avec un milieu défensif (sentinelle), un offensif (le "10") et deux relayeurs. Et un seul avant-centre.

Ce système est une combinaison de deux autres, plus classiques, le 3-5-2 et le 4-4-2 losange, le but étant  de s'appuyer les points forts de chacun. 


Dans un 4-4-2 losange la densité axiale permet un pressing efficace dans le coeur du jeu et un jeu de possession, la proximité des milieux offrant plusieurs circuits de passes possibles. Par contre, dépeuplé dans les couloirs, le système nécessite une couverture efficace de la part des milieux relayeurs (ou avant-centres) pour soutenir les latéraux. En phase défensive, l'adversaire peut se créer des espaces dans le bloc en renversant le jeu régulièrement - le système n'est pas fait pour bien couvrir toute la largeur du terrain au niveau des milieux. En phase offensive, le jeu peut être facilement neutralisable dans l'axe si les latéraux, les milieux relayeurs ou les offensifs n'apportent pas suffisamment de solutions sur la largeur.


Dans un 3-5-2 classique il y a une bonne couverture de la largeur, soit au niveau des défenseurs (défense à 5), soit au milieu (défense à 3, milieu à 5). C'est un système qui offrent des garanties à la perte du ballon, car il y a une sentinelle devant les défenseurs et l'espace dans le dos des latéraux peut être couvert par les défenseurs. Comme tout système à un seul joueur par couloir, il y a un risque d'infériorité numérique sur les ailes, défensivement et offensivement. En fonction des profils utilisés ce système peut devenir très défensif, avec seulement deux joueurs offensifs sur le terrain, livrés à eux-mêmes dans les 20 derniers mètres.


Dans un 3-1-4-1-1 on retrouve ainsi les caractéristiques du losange au milieu, un système qui prône un jeu de possession, combiné avec la sécurité défensive à la perte du ballon offerte par une défense à 3. Par contre, les inconvénients qui découlent de la présence d'un seul joueur de couloir restent bien présents. La capacité des pistons à bien tenir et animé leur côté et la compensation des milieux deviennent critiques pour ne pas s'enfermer dans l'axe en phase de possession et ne pas subir dans les couloirs sans le ballon.

Ce niveau système des Verts implique l'utilisation d'un seul avant-centre et non deux comme dans les deux autres systèmes classiques. Ceci permet d'avoir plus de sécurités défensives par rapport à un 4-4-2 losange ou plus de possession qu'un 3-5-2. Mais moins de présence devant les buts, sauf si les pistons et milieux se projettent.


Les rôles clés


Tous les postes sont importants, bien sûr. Mais pour que cette approche tactique soit une réussite, il faut des joueurs capables de bien animer leurs rôles respectifs. 
  • L'avant-centre doit être efficace, car il peut souvent se retrouver seul dans la surface. Sinon, on risque d'assister à une large possession stérile
  • Les deux joueurs de couloir sont des ailiers, pas de défenseurs. C'est assez rare qu'ils descendent au niveau de défenseurs (pour une défense à 5), ils ont surtout un rôle offensif, soit pour déborder et centrer, soit pour rentrer dans le coeur du jeu et épauler leur avant-centre dans la surface. Néanmoins, ils doivent tenir seuls leur couloir, la capacité de répéter les efforts est importante, comme dans tout système à base de pistons
  • Les défenseurs doivent bien s'entendre, car ils sont obligés de couvrir à 3 toute la largeur du terrain, donc de bien coulisser ensemble. De plus, comme ce système prône une possession dans la moitié adverse, donc une défense haute, il est important qu'ils arrivent à bien gérer les transitions défensives
  • Les milieux sont la clé de l'animation offensive, car l'idée est de concentrer le jeu dans l'axe, avec une maîtrise technique importante. La capacité de multiplier les appels et de combiner dans des petits espaces sans perdre le ballon est critique. Mais ils sont aussi très importants pour combler les "manques" de leurs coéquipiers:
    • une projection vers l'avant, pour apporter le surnombre nécessaire autour de la surface
    • des relayeurs qui peuvent s'excentrer pour bloquer les couloirs
    • une sentinelle capable de bien couper les angles de passe, car ses défenseurs risquent d'être écartés
Le mercato n'est pas encore fini, dans les deux sens, des départs et des arrivées, il est encore tôt pour dire si l'effectif stéphanois est bien constitué pour animer ce système. De toute façon, il faudra du temps pour le peaufiner, il n'est pas facile à maîtriser. Et même quand ça sera le cas, il aura toujours des points faibles, qui semblent être assumés par l'entraîneur, comme il nous le déclarait en novembre dernier : "la faiblesse du système que j’ai mis en place, mais c’était assumé, c’est le déséquilibre. Vu comme on jouait offensivement, on était par moment en gros déséquilibre derrière"

Il faudra donc avoir de la patience pour voir les principes de jeu voulus se mettre graduellement en place, mais aussi de la confiance dans le staff pour faire les ajustements nécessaires si c'est pas le cas. En attendant, on espère que les informations ci-dessus permettront aux supporters des Verts de mieux comprendre les matchs de leur équipe, en commençant par le premier de la saison, ce samedi.

Allez les Verts !