samedi 29 septembre 2018

ASSE - Monaco, 2-0 (Khazri x2)

Une semaine complète


Troisième match en six jours et troisième victoire consécutive - une belle semaine pour les Verts qui montrent de plus en plus de progrès dans la maîtrise tactique et technique.

Le match a été assez ouvert avec des occasions des deux côtés. Leur manque de réalisme offensif et les parades de Ruffier n'ont jamais permis aux Monégasques de revenir dans la partie, mais avant tout, ils ont largement perdu le combat tactique contre l'ASSE de Jean-Louis Gasset. Le plan de jeu de Monaco était de bien défendre, empêcher les offensives stéphanoises et profiter à fond des contres et récupérations hautes. Mais trois éléments ont contrarié ce plan : les Verts ont déjoué le piège du système tactique adverse, ils ont empêché leurs adversaires du développer du jeu avec une grosse intensité dans les duels et du pressing et ils ont affiché une grosse maîtrise technique et tactique dans leur animation offensive. Voici quelques exemples de ces trois éléments.


Système adverse


Contre l'ASSE, le coach de Monaco a choisi un système tactique inhabituel pour eux, un 3-5-2 - comme les trois milieux axiaux sont disposés dans un triangle pointe basse, on peut donc parler d'un 3-1-4-2 :


Bien évidemment, en phase défensive, ce système dévient un 5-3-2, mais avec le même triangle au milieu :


Les raisons de ce choix tactique sont visibles sur cette image. Si l'ASSE joue avec trois attaquants (Diony - Khazri - Salibur) et si un latéral stéphanois monte haut, les 5 défenseurs peuvent défendre facilement tout en restant en supériorité numérique (Khazri est pris par deux adversaires). Quant aux milieux axiaux, ils sont théoriquement en 3-contre-3, leur triangle pointe basse étant le miroir du triangle pointe haute des Verts (M'Vila - Selnaes - Cabella). Autrement dit, l'axe est fermé et les couloirs pris par des latéraux sans laisser des trous dans l'axe. Et comme il y a deux avant-centres, les Stéphanois ne se permettent pas d'attaquer avec les deux latéraux en même temps, pour ne pas laisser la charnière centrale en déséquilibre.


Un choix tactique qui semble judicieux, même si c'est une approche très défensive, Monaco ressemblant ainsi à une petite équipe qui essaye de bétonner et jouer les contres quand elle se déplace à Geoffroy-Guichard. Mais ce système a été facilement déjoué par l'ASSE, comme par exemple à la 30e minute :


Une sortie de balle propre pour l'ASSE, avec Ruffier - Perrin - M'Vila, Subotic et Kolodziejczak. Le triangle pointe basse monégasque est en place, mais il ne sert à rien :


Cabella et Selnaes, les deux milieux axiaux, se sont excentrés. Ils se placent ainsi dans la zone des deux pistons adverses, abandonnant l'axe, mais créant aussi un 3-contre-3 dans la défense adverse :


Diony fait un appel dans le dos du latéral monté suivre Cabella dans le couloir, il est trouvé par la passe de Kolo et la défense de Monaco se retrouve en difficulté. Le centre de l'attaquant stéphanois ne cherche ni Khazri, ni Salibur, mais Selnaes...


... qui était venu proposer une solution, passant devant le latéral et le milieu adverse. Malheureusement sa frappe n'est pas cadrée.


Bref, ça peut être une bonne idée de bloquer l'axe, mais si l'adversaire s'adapte en excentrant ses milieux, le déséquilibre peut être créé facilement. Surtout que Cabella était suivi par un latéral à chaque fois qu'il s'excentrait, comme on pourra le voir dans d'autres exemples. Mais avant cela, une autre facette du jeu stéphanois.


Pressing haut


A la 22e minute, la sentinelle de Monaco joue un coup franc dans sa propre moitié :


Les trois défenseurs centraux sont en place et Khazri et Diony entament un pressing. Selnaes, Cabella et Salibur les accompagnent...


... empêchant le jeu vers l'avant. Ainsi, quand le défenseur central reçoit le ballon, il est pressé par Khazri et absolument tous ses coéquipiers dans la moitié de terrain monégasque sont marqués individuellement :


Il n'a pas d'autre solution que le jeu long. Le ballon est réceptionné par Gabriel Silva, mais son contrôle est approximatif est un adversaire en profite...


... mais par pour longtemps. Perrin gagne son duel contre un avant-centre, Selnaes le sien contre un milieu, et M'Vila hérite du ballon. Il peut avancer balle au pied, et même s'il a deux adversaires devant lui, ses quatre coéquipiers offensifs sont tous sur la même ligne de trois défenseurs et lui offrent des solutions :


Il choisit Khazri, qui ne combine pas avec Salibur dans le couloir, pourtant désert, mais qui profite de l'appel de Cabella dans l'axe, qui serre la défense et qui libère Diony de l'autre côté :


Malheureusement, le choix de ce dernier est une passe en retrait pour M'Vila, qui n'a pas le temps d'armer sa frappe avant d'être dépossédé.


Déjà que les Monégasques étaient venus défendre, le pressing haut a servi à les contenir encore plus dans leur moitié, à les empêcher à construire. C'était donc à l'ASSE de faire le jeu et de construire des belles attaques placées. En voici deux exemples.


Attaques placées


Très peu après la pause, Monaco attaque sur une aile, mais Diony presse le latéral adverse et récupère le ballon :


Il arrive à Kolo et la sortie de balle est rapide et précise : M'Vila, Diony, Cabella (excentré). Ce dernier calme le jeu et revient en arrière, laissant le temps aux deux équipes de se mettre en place :


Le 5-3-2 monégasque est un peu cassé par le latéral droit qui suit Cabella comme son ombre. Kolo et M'Vila échangent des passes et le premier joue en arrière avec Subotic, ce qui aspire le bloc de l'ASM :


5 adversaires essayent d'enfermer les Stéphanois dans ce coin du terrain, mais la sortie à une touche de balle est exceptionnelle. Selnaes reçoit le ballon dans le rond central et un décalage commence à se créer :


Cabella et Diony sont très excentrés à gauche, ce qui oblige un défenseur central de s'y placer. Ce qui laisse les deux autres à surveiller Khazri et Salibur, qui font des appels coordonnés, le premier en profondeur, le deuxième qui décroche. C'est Salibur qui est choisi et il écarte avec Gabriel Silva dans le couloir droit, surveillé par le latéral adverse, comme prévu. Mais ces mouvements ont cassé la défense monégasque en deux :


Deux d'un côté, trois de l'autre, à chaque fois en égalité numérique avec les Stéphanois, et Selnaes tout seul dans l'axe de la défense, surtout que la sentinelle adverse est attirée par le mouvement de Khazri et Salibur. Le premier est trouvé par Silva, il talonne pour le deuxième, qui n'a plus qu'à lancer Selnaes vers le but, mais l'arbitre siffle un tirage de maillot contre l'ASSE.




Un autre exemple d'adaptation tactique stéphanoise contre le système adverse commence à la 40e, avec une longue touche effectuée par Gabriel Silva :


Subotic écarte à gauche avec Cabella, qui lance Kolo dans le couloir. Les joueurs de Monaco sont de nouveau en place :


Triangle pointe basse au milieu, quatre défenseurs qui surveillent Diony-Khazri-Salibur et un 5e qui tient le couloir, Kolo étant assez offensif. Mais les trois milieux ne servent à rien, tombant dans le piège du faux placement de Cabella :


Cabella ("10") et Selnaes ("8") ont changé de place et pendant que les adversaires se concentrent sur le premier, M'Vila trouve avec une merveille de passe le deuxième - c'est le Norvégien qui s'était placé entre les lignes, dans l'axe. Il combine avec Diony, qui lance Kolo dans le couloir gauche, la défense n'étant pas alignée. Le centre du latéral au deuxième poteau ne peut pas être repris par Khazri (entre deux défenseurs) ou Salibur (contre un seul, mais trop loin) :


Le ballon semble destiné à sortir en touche, mais c'est sans compter sur Cabella et Selnaes. Si on regarde où ils sont au moment du centre, c'est impressionnant de voir le ballon toujours en jeu...


... et en possession du 2e, après que Silva ait récupéré le sauvetage du premier. Le Norvégien calme le jeu, reculant un peu et combinant avec Perrin et M'Vila :


Il prend ensuite le temps de regarder les appels de ses coéquipiers :


Et la défense est de nouveau en déséquilibre, la faute du même latéral droit, pas placé, mais aussi, de nouveau, du placement excentré de Cabella. Il est pris par le piston gauche de Monaco, mais comme Gabriel Silva est monté haut, il est doit être pris par un défenseur central, laissant ainsi les deux autres contre Salibur, Khazri et Diony. Comme ils ne sont pas aidés, ni par le piston droit, ni par les milieux, il y a un trou dans la défense et l'appel et la passe sont parfaits, pour l'ouverture du score.



Conclusions


Après plusieurs matchs sans victoire et une défaite sèche à Paris, il semblait peu probable que l'ASSE puisse enchaîner trois victoires en 6 jours. Et pourtant, ça a été le cas, avec certes une dose de réussite, mais aussi beaucoup de maîtrise. Au delà de cette belle série de victoires, c'est très rassurant de voir le jeu stéphanois se mettre peu à peu en place. Les sorties de balles sont propres, le positionnement des joueurs sur le terrain est intelligent et souvent parfaitement adapté à pousser l'adversaire à l'erreur, technique (contre Toulouse) ou tactique (contre Monaco). Tout n'est pas parfait, loin de là, et il y aura des adversaires plus difficiles à jouer. Mais la progression dans le jeu est visible et ces Verts semblent loin d'avoir atteint le maximum de ce qu'ils peuvent proposer.

mercredi 26 septembre 2018

Toulouse - ASSE, 2-3 (Diony, Cabella, Salibur)

Tactique et réussite


Première victoire à l'extérieur pour les Verts cette saison, marquée par une bonne dose de réussite, mais aussi une approche tactique inhabituelle.

Si le choix du staff stéphanois de faire tourner un peu l'effectif lors d'une semaine à 3 matchs et de faire appel à des jeunes peut facilement se comprendre, le choix du système tactique est beaucoup plus surprenant. Pour la première fois sous Gasset, les Verts ont été disposés dans un 4-3-2-1 aussi appelé "Sapin de Noël" :


KMP n'a pas joué ailier, comme d'habitude, mais milieux axial dans une ligne de trois avec M'Vila et Assane Diousse (puis Selnaes). Devant eux, Nordin et Cabella, et en pointe, Diony.

Ce système a été rendu célèbre par Ancelotti et une description de ses caractéristiques peut être lue sur les cahiersdufootball.net. Pour faire simple, ce système nécessite une bonne possession de balle pour construire patiemment en attendant les décalages trouvés grâce à un meneur de jeu reculé (M'Vila pour nous) et deux électrons libres qui offrent des solutions entre les lignes (Nordin et Cabella). L'équipe est très axiale - en phase de possession les latéraux doivent prendre les couloirs, sans le ballon il est difficile de défendre contre un adversaire qui écarte bien le jeu.

Le choix de ce système devient encore plus surprenant si on prend en compte que l'ASSE n'a pas cherché à avoir et n'a pas eu la possession à Toulouse et que les latéraux ont peu pesé sur le jeu. Ces éléments et quelques avantages et inconvénients de ce sapin de Noël seront visibles dans les exemples suivants.


Les côtés


Le point faible de ce système vient du nombre réduit de joueurs dans la ligne des milieux - à 3 c'est plus difficile de couvrir toute la largeur du terrain, surtout si l'adversaire change de côté. Par exemple, à la 12e minute, le TFC commence une attaque sur la gauche :


Le 4-3-2-1 de l'ASSE est visible, ainsi que le 4-3-3 adverse, avec deux latéraux assez haut sur le terrain. Le ballon circule d'abord à gauche, ensuite dans l'axe...


... et le jeu est écarté à droite. Cabella et Assane Diousse sont assez loin du latéral droit toulousain, mais dans une ligne à 4, ça ne devrait pas poser de problème. Par contre, dans ce système, ce n'est pas forcément à Cabella de surveiller le couloir, mais à son coéquipier du milieu :


Assane Diousse va donc bloquer le latéral, ouvrant ainsi un angle de passe vers un milieu axial. Ceci oblige Kolo de sortir - ce n'est pas grave, son ailier avait dézoné en se mettant entre les lignes. Mais comme M'Vila doit sortir sur l'autre milieu...


... le décalage est créé. Il n'y a personne pour prendre l'attaquant placé entre les lignes, qui lance le latéral dans l'espace libéré. Heureusement sur son centre au 2e poteau, Gabriel Silva est poussé dans le dos par un adversaire et les Verts récupèrent la faute. Ça ne devrait pas être facile de trouver un joueur entre les lignes, surtout dans un bloc bas et compact, mais les Toulousains y sont parvenus deux fois dans cet exemple. Avec trois milieux, si un doit couvrir le couloir, il y a tout simplement plus d'espace pour les passes, soit dans l'axe, soit vers le côté.  

L'axe et les contres


Par contre, si le bloc en 4-3-2-1 a du mal à couvrir tous les espaces en coulissant de gauche à droite, il a l'avantage d'être dense dans l'axe et avoir trois joueurs offensifs prêts à partir en contre. Par exemple, peu après la pause, le TFC lance une attaque :


Il y a peu d'espace entre les trois milieux stéphanois, mais ils doivent coulisser vers la droite, où le ballon est envoyé. La circulation du ballon est classique, le latéral adverse monte haut...


... et donc KMP le suit. L'espace entre les milieux stéphanois est beaucoup plus important maintenant. Le ballon revient vers l'axe :


Les lignes de 4 et 3 Verts sont bien en place, l'espace entre les milieux se resserre, et Nordin vient couper les passes aussi. L'idée serait d'écarter vers l'autre côté, vu la position d'Assane Diousse, mais le milieu adverse essaye de passer dans l'axe, et il perd le ballon. Les Verts peuvent partir en contre :


Diousse trouve Diony, dos au but, qui remet dans la course de Nordin, pendant que Cabella sprinte de l'autre côté. Le jeune Stéphanois monte avec le ballon et a deux options devant lui :


Malgré l'appel de Cabella à gauche, il préfère Diony à droite et finalement le ballon est perdu dans le duel contre le défenseur. Même si aucun des trois buts de l'ASSE n'a été marqué suite à un contre, la présence et le positionnement de ces trois joueurs offensifs laissent penser que c'était le plan de jeu envisagé par le staff stéphanois.

4-3-2-1 ou 4-2-3-1 ?


En phase de possession du ballon, le 4-3-2-1 peut facilement se transformer dans un système plus traditionnel, avec deux milieux axiaux, deux ailiers, un 10 et un avant-centre. Il suffit pour cela d'avoir un des trois milieux monter plus haut. Et avec la contribution des latéraux on peut mettre en place une animation offensive classique. Est-ce que c'était le cas de l'ASSE ? Trop rarement avant l'heure de jeu. Si on considère cet exemple à la 32e :


Un dégagement adverse est gagné de la tête par Assane Diousse et le ballon parvient à Cabella, excentré à gauche. KMP se trouve sur la même ligne, à droite, et Nordin dans l'axe, en position de "10". Ça ressemble donc à un 4-2-3-1 : 


Nordin fait un appel dans l'espace libéré par le latéral droit adverse qui était allé après Cabella. Ce dernier remet en arrière à Diousse avant de faire le même appel. On retrouve ainsi les deux électrons libres stéphanois dans la même zone du terrain :


Ça oblige les défenseurs à les suivre, laissant Diony en un-contre-un dans l'axe. Mais il n'y a aucun autre Stéphanois présent dans les 30 derniers mètres ! KMP n'avait pas suivi...


... et les autres milieux ou les latéraux non plus. Bref, Nordin-Cabella-Diony se retrouvent tous seuls contre la défense (et les milieux défensifs) adverses, comme souvent lors de cette rencontre. Même comme ça, le danger est présent - il y a un bel espace entre deux défenseurs, Diony fait l'appel qu'il faut, mais c'est Nordin qui est servi par Cabella. Malheureusement, il perd le duel contre le défenseur.

Le pressing et la réussite


Si les Verts n'ont pas été très dangereux sur attaques placées et si leurs contres n'ont pas fait mouche, comment ça se fait qu'ils ont marqué trois buts ? Avec de la réussite, mais aussi grâce à un pressing haut impitoyable. Et dans les deux cas, l'ingrédient principal a été l'envie, la hargne, la détermination. Comme celle de Diony ou Salibur sur leurs buts, mais aussi celle de Selnaes :


Avant même que le gardien adverse arme sa passe, il démarre un sprint en partant de quelques mètres derrière le milieu axial qu'il était censé surveiller (comme M'Vila à côté de lui) pour mettre la pression sur un autre milieu. Et comme Cabella l'accompagne, ils sont récompensés - la réussite et les erreurs adverses, ça se provoque.


Conclusions


Même si la victoire a été au rendez-vous, elle n'est pas forcément une conséquence directe de l'innovation tactique de Gasset. Même si le système en 4-3-2-1 est intéressant et a du potentiel, son utilisation n'a pas été parfaite. Il faudrait le revoir sur plusieurs matchs, avec des vraies animations offensives, non seulement un jeu sans ballon et des contres. Mais à l'heure actuelle ce loin d'être clair si c'est une vraie volonté de basculer vers ce système régulièrement ou si ce n'était qu'une improvisation tactique, adaptée à l'adversaire et à l'effectif disponible. Le futur nous le dira, mais pour l'instant il faut tout simplement avouer que c'était osé de sortir une telle innovation en pleine semaine à trois matchs - et la réussir en plus ! Mais à la fin, la fortune sourit aux audacieux...

lundi 24 septembre 2018

RCT - Agen, 33-3 (Tuisova, Escande, Messam, Belleau, Fekitoa)

L'avant-match


C'est désormais évident pour tout le monde, le RCT a vraiment du mal en ce début de saison. Après leur troisième défaite en quatre matchs, les Toulonnais sont maintenant en obligation de gagner. Théoriquement, la réception d'Agen devrait être un match à leur porté - mais comme ils sont dans une grosse crise de confiance, la victoire ne sera pas facile. Et pourtant, elle est essentielle, surtout accompagnée par la manière. Sinon, la spirale négative sera encore plus difficile à casser...

Le match...


... a eu deux périodes distinctes. En première, les Toulonnais ont déroulé leur rugby, écrasant l'adversaire. Un impressionnant volume de jeu, des ballons gardés et des attaques préparées patiemment et trois essais marqués. 19-0 à la pause, on ne peut pas dire qu'il y a eu match lors de ces 40 minutes. Et quand le RCT n'avait pas le ballon, la défense était en place, calme, coulissant bien - jour et nuit par rapport à la semaine dernière.

En 2MT, par contre, les Toulonnais sont retombés dans leurs travers. Ils ont été largement dominés lors des 20 premières minutes, souvent donnant le bâton pour se faire battre. Deux essais agennais refusés pour un en-avant de passe et un ballon pas aplati après un maul auraient pu coûter cher. Mais peu à peu, les joueurs du RCT ont commencé à se réveiller, contenant mieux les attaques adverses, ne se laissant plus pénétrer. Et l'exploit de Belleau, puis la magnifique attaque All-Black à la fin on scellé le score final.

L'action


On s'approche des dix dernières minutes de la rencontre et le RCT commence enfin à sortir de sa moitié, à garder les adversaires loin, même si le bonus offensif ne tient pas à grande chose. Une attaque est construite sur la ligne de 40m :


Les Toulonnais sont disposés des deux côtés, Meric (9) sort pour Belleau (10) à droite. Il n'y a pas de surnombre, la passe du demi d'ouverture saute Nakosi (15) pour son frère (14), qui fonce tout droit, sans jouer avec Lakafia (7) à sa droite. Le ballon est ressorti pour un point de fixation...


... et le dispositif des Toulonnais est visible. Deux groupes formés de deux arrières et un 3e ligne de chaque côté : à droite Tuisova (14), Nakosi (15) et Lakafia (7), à gauche Saivea (11), Fekitoa (12) et Potgieter (6). Deux groupes formés de trois avants chacun : celui qui a fixé la défense - Setiano (3), Rebbadj (5) et Messam (8) - et celui qui se tient prêt à la fixer de nouveau - Gros (1), Soury (2) et Kruger (4). Finalement, le centre Pietersen (13) est placé dans l'axe du demi d'ouverture. Ainsi, quand Belleau (10) reçoit le ballon de son demi de mêlée...


... la défense s'attend à deux choix possibles. Envoyer le centre (Pietersen) ou le groupe d'avants en percussion. Sauf que Belleau choisit la troisième, franchir la ligne et sprinter vers l'essai, malgré la présence de 3 arrières adverses en soutien. Cet essai qui sécurise le bonus a fait énormément du bien au RCT, marquant de facto la fin du suspens. 

La suite


Un match référence ? Probablement pas, l'adversaire était relativement pas à la hauteur. Mais cette victoire, bonifiée, fait vraiment du bien. Et le RCT en avait besoin, avant deux déplacements très difficiles à Clermont et Montpellier. Il y a du turnover à prévoir et les résultats ne seront vraiment pas importants. Par contre, c'est la manière qui comptera, il faudra éviter des non-matchs comme à Paris, pour ensuite attaquer la Coupe d'Europe dans les bonnes dispositions.

dimanche 23 septembre 2018

ASSE - Caen, 2-1 (Khazri, Kolodziejczak)

Une saison enfin lancée ?


Premier match de la saison devant les deux Kops, première victoire maîtrisée - et si le match contre Caen marquait le vrai début de la saison des Verts ?

Avec un effectif quasi au complet (aucun titulaire absent, seul Beric manquait), le staff stéphanois est revenu au système tactique utilisé lors de la deuxième partie de la saison dernière : un 4-2-3-1 avec Cabella en 10 - c'est Diony qui a fait les frais, le poste d'avant-centre revenant à Khazri. Même si elle a mis du temps à se dessiner, la victoire stéphanoise ne souffre aucune contestation, même les adversaires la trouvant normale.

Comme la semaine dernière, on commence à partir de l'analyse du capitaine : "En première mi-temps, on les a un peu usés avec des joueurs de couloir qui ont beaucoup défendu, le penalty vient d’un côté. En deuxième, on les a un peu étouffés". Mais avant de regarder de plus près comment les Verts ont étouffé leurs adversaires, il y a un détail que Perrin ne mentionne pas : le jeu long de M'Vila. C'est bien connu, il est un joueur très important dans la construction stéphanoise et les statistiques montrent une variation importante dans son jeu. De janvier à mai, il a fait 75 passes en moyenne par match, dont seulement 9 (12%) des longs ballons. Contre Caen, il a fait 62 passes, dont 19 longues (30%) - en 1MT ça a été même 42% de longs ballons ! Cette variation dans le jeu n'est pas accidentelle et les exemples suivants nous montrent le rôle essentiel de M'Vila dans les attaques de l'ASSE.


Le match dans une action


Les dispositions tactiques des deux équipes sont évidentes dès le début du match :


Les Caennais sont placés dans un 4-1-4-1, avec une sentinelle et un attaquant au marquage de Cabella et M'Vila, respectivement. Pendant que la défense stéphanoise garde le ballon, Cabella et Selnaes permutent : 


L'avant-centre adverse se laisse aspirer par le ballon, Cabella décroche encore plus, ce qui fait sortir un milieu caennais du bloc. Salibur décroche aussi dans cet espace et Khazri s'excentre à sa place. Comme M'Vila n'est plus surveillé...


... il est trouvé par Perrin et il peut lancer Salibur qui est fauché avant qu'il puisse servir Debuchy à droite. Le coup franc est joué et M'Vila à de nouveau la possibilité de faire une passe verticale :


C'est Khazri qui en est le destinataire et il combine avec Debuchy au long de la ligne de touche. Cabella et Salibur ne sont pas loin...


... et c'est le dernier qui est trouvé par la passe de Khazri. La présence de quatre Stéphanois techniques dans un petit périmètre concentre la défense, pendant que Selnaes et M'Vila restent dans l'axe en dehors du bloc adverse. Le centre de Salibur est repoussé...


... mais pas loin, Selnaes peut le récupérer tranquillement. Il combine avec Khazri avant de lancer Debuchy à droite. Le latéral Vert ne centre pas, mais lance Salibur en profondeur :


Il y a une forte présence stéphanoise dans la surface, avec pas moins de quatre joueurs contre trois défenseurs - pendant que Selnaes et M'Vila maintiennent leur position. Malheureusement, Salibur ne centre pas, mais essaye une talonnade pour Debuchy - la défense intercepte et dégage le ballon...


... toujours pas loin. C'est Perrin qui le récupère et joue avec les deux milieux axiaux, prêts à relancer l'attaque. Ainsi, M'Vila a le temps d'ajuster une passe sautée... 


... qui trouve Debuchy. Son centre-tir passe légèrement au dessus de la transversale.

Même si cette action peut sembler anodine, elle résume parfaitement le plan tactique des Verts. Deux milieux axiaux qui orientent le jeu (surtout M'Vila), des offensifs qui dézonnent et qui essaient de combiner entre eux et du jeu qui passe sur le côté (surtout à droite). Et une récupération rapide du ballon dès que la défense essaye de se dégager, pour ne pas laisser respirer l'adversaire, ce sentiment de "vagues vertes successives" qui cherchent à déséquilibrer la défense. 

L'alternance dans le jeu de M'Vila


Un autre exemple de ce genre d'attaque stéphanoise commence à la 64e, tout de suite après l'entrée de Diony à la place de Hamouma :


M'Vila est trouvé entre l'avant-centre et la ligne de 4 milieux adverses. La sentinelle de Caen est en place, mais ne sert pas à grande chose, Cabella et Selnaes étant dans la ligne des milieux. 


M'Vila envoie un long ballon en profondeur pour chercher Khazri - le ballon est dégagé par la défense...


... mais seulement jusqu'à Cabella, qui combine avec Selnaes. Comme Salibur est assez axial, la défense ne couvre pas toute la largeur...


... et Debuchy est bien trouvé par Cabella. Son centre au deuxième poteau et repoussé en touche par un défenseur. Kolo remet en jeu avec M'Vila :


Diony décroche pour offrir une solution et redonne le ballon à M'Vila...


... qui voit l'appel de Debuchy à droite et le trouve avec une belle transversale. Le centre du latéral est repoussé...


... mais de suite récupéré par Perrin, qui joue avec Selnaes et M'Vila au centre du terrain :


La défense adverse remonte, Diony - Cabella - Salibur et Debuchy la suivent, pendant que Khazri a du mal à revenir. Cabella décroche, mais loin de la sentinelle adverse...


... et il est trouvé par une belle passe de M'Vila. Il est fauché par un milieu qui revient et Selnaes joue le coup franc vers la droite :


Le centre de Debuchy est contré et le ballon sort en touche. Il la joue en retrait avec Perrin...


... qui voit l'appel de Cabella dans le dos des milieux. Le centre du meneur de jeu stéphanois est repoussé en corner. 

Il y a beaucoup d'éléments communs entre cette action et celle de l'exemple précédent, en début de match. La différence est dans la conclusion : sur ce coup de pied arrêté, Kolo marque son premier but sous ses nouvelles couleurs. Comme un symbole, même sur le corner on a eu le sentiment de mini "vagues vertes", c'est au bout du troisième tir que le ballon est finalement entré dans le but.



Le foot simple


Mais les attaques stéphanoises n'ont pas toutes pris la forme des vagues successives, avec un M'Vila qui alterne entre les longs ballons en profondeur, les transversales et les passes verticales. Une beauté d'action collective commence avec le coup d'envoi de la 2MT :


Le ballon est envoyé en arrière vers Subotic, pendant que les deux blocs se mettent en place :


Le 4-2-3-1 de l'ASSE contre le 4-1-4-1 de Caen. Selnaes est trouvé dans l'axe et le dézonnage commence :


Selnaes porte le ballon ce qui attire un milieu, Khazri décroche dans cet espace libéré, Hamouma repique dans l'axe à sa place, Cabella s'éloigne de la sentinelle. Et le ballon arrive à M'Vila...


... qui le garde quelques secondes. Les offensifs stéphanois se replacent dans l'axe de la défense, toute bien resserrée, laissant un énorme décalage à droite. Le ballon y est dirigé, via Selnaes et Perrin ... 


... et la passe du capitaine trouve Salibur, collé à la ligne de touche. Les 4 offensifs stéphanois se trouvent quasiment sur la même ligne, comme la défense. Tout ce monde coulisse vers ce côté, mais c'est du 4-contre-4. Le un-deux Salibur-Cabella fonctionne à merveille...


... et le décalage à droite s'est transformé dans une occasion de but, Salibur se dirigeant vers la surface, où ses deux coéquipiers se tiennent prêts. La suite est connue : faute et égalisation sur penalty. Le tout en 30 secondes après le coup d'envoi - simple, rapide et beau.



Conclusions


Cette maîtrise tactique et technique et la volonté constante de proposer des solutions sont des éléments très encourageants pour la suite. Une équipe bien assise sur le terrain, des décalages bien créés, et un énorme M'Vila à la baguette - les situations dangereuses semblent faciles à créer. Et quand le taux de réussite des combinaisons dans les derniers 30 mètres sera plus élevé, les attaques stéphanoises feront très mal. Mais il ne faut pas se voiler la face, il reste encore plein de choses à améliorer dans le jeu des Verts et des adversaires mieux en place poseront des problèmes différents. Néanmoins, cette victoire est la bienvenue - si elle est bonifiée par d'autres bons résultats dans cette semaine à trois matchs, la saison de l'ASSE sera enfin lancée comme il faut.